BOIRE, BAISER, ÉCRIRE (UN AIR DE BUKOWSKI)

 

Au Sham's Théâtre
25 Rue St Jean le Vieux
84000 – Avignon

du 7 au 30 Juillet 2022
à 23h15

Relâches les 12,19,26 juillet

 

Boire, baiser, écrire (Un air de Bukowski) loupe 

 

Dans les entrailles d’un passionné
Un portrait de main de maître

 

En ces époques bénies des années 80’, nous attendions avec impatience notre rendez-vous télé des vendredis soir avec Apostrophe de Bernard Pivot. Sur le plateau se côtoyaient les livres et les cendriers débordants. Le 22 septembre 1978, l'écrivain Bukowski faisait partie des invités. Oscillant entre la littérature et l'alcool, il avait apporté son livre et... ses bouteilles. Sa prestation avinée fut interrompue par Cavanna qui s'adressa à lui par un : « ta gueule » sous les yeux médusés de Pivot. La belle époque du direct où tout ou presque était permis... Quand l’impensable aujourd’hui était la norme hier…

Bukowski est mort en 1994. Pour ceux qui ne le connaissent pas, peu ou mal, cette pièce est faite pour vous. Aller voir ce spectacle, c'est se prendre une bonne gifle d'émotion. Des poèmes aux confidences, nous entrons de nouveau dans son monde loin du paraître et des apparences trompeuses.

Sur scène, le sol est déjà jonché de canettes de bière vides, de feuillets froissés. Une sobriété visuelle laisse toute la place à Oldan et c'est une plongée dans la réalité virtuelle. Il nous attend assis derrière un petit bureau, absorbé dans ses réflexions, dans ses manuscrits qu'il parcourt, lit, annote.

Il sort de ses pensées et semble enfin nous voir. Il prend la parole et s’il fallait utiliser un seul adjectif pour qualifier cette parole, ce serait en effet bien celui de « libre »

Oldan ne joue pas, il vit, un être vibrant, vrai, nourri et imprégné de Bukowski jusqu'au fond de ses tripes. Il l'incarne et en puise toute la substance pour nous la restituer avec profondeur et sincérité. L'effet est poignant et va s'inscrire longtemps dans la mémoire des spectateurs et si les larmes montent, c'est que ses mots, sa voix, sa présence sont saoules de douleur, d'alcool, de désespoir et de beauté. Il se livre totalement, les canettes de bière se vident et s'accumulent puis ce seront les verres de vin (du vrai) puis juste un peu d'alcool fort. Il traduit à merveille le déraillement qui le détruit de l'intérieur.

Pour rendre la force à ces lectures et à en conjurer les silences il faut un grand acteur et une mise en scène discrète et sans artifice Tout se joue derrière sa petite table et par un jeu de lumière qui crée l'espace et la tension. Un rôle mais peut-on parler de rôle, qui nécessite autant d'énergie que de délicatesse.

On ne ressort pas intact d'une telle mise en abîme il nous a fissuré le cœur et nous avons rarement eu l'impression de goûter à un tel degré un spectacle si authentique.

Oldan nous invite à le suivre pour un dernier verre. Pas même le temps de l'applaudir qu'il nous attend à côté. Il n'attend pas d'ovation ni de compliment. Si vous l'aimez, il est heureux mais si vous ne l'aimez pas, il l'est tout autant. Un électron libre qui refuse les codes, il ne faut surtout pas le perdre de vue.

Fanny Inesta

 

Boire, baiser, écrire (Un air de Bukowski)

Auteur et interprète : Oldan

Mise en scène : Daniel Olive, Roland Abbatecola
Création visuelle : Léo Sam
Attachée de presse: Dominique Lhotte