Entête

FIN DE PARTIE

 

Théâtre de l'Atelier
place Charles Dullin
75018 Paris
01 46 06 49 24

Jusqu’au 5 mars.
Du mardi au samedi à 19h.
Dimanche 15h

 

Fin de partie loupePhoto © Pierre Grosbois

 

Quoi de neuf ? Beckett, bien sûr.

L'occasion est belle, en ce début 2023 de courir au théâtre de l'Atelier pour y voir (ou revoir) Fin de partie.

Étrange pièce : elle semble s'inscrire dans la lignée de En attendant Godot, et puis non. C'est la même ambiance poisseuse, les mêmes personnages déséspérés (ici un vieillard aveugle et paralysée et son factotum-souffre-douleur) mais il y a des rajouts, des varantes. La scène est intérieure, nous sommes dans un gourbi, un abri, on ne sait pas exactement, mais la fin d'une époque est là. Tout a disparu ou disparaît, et ce qui reste du monde s'organise entre Hamm, ce vieillard tyrannique (affligé de ses parents qui vivent dans des poubelles !) et Clov à qui Denis Lavant prête sa gestuelle, sa démarche claudicante, son sens du rythme et son visage tragique.

La mise en scène, efficace, joue la montre : à juste titre, elle prend son temps. Elle installe les choses, déroule les micro-événements, transcende cette parole qui se cherche, hésite et qui, quand elle se trouve, ne fait qu'esquisser une théâtralité trompeuse.

Tout passe. La blague du tailleur, le leit-motiv des calmants, l'histoire sans cesse recommencée de Hamm, les jeux de scène de Clov autour d'un réveil, d'un escabeau ou... d'une puce.

Bien que s'inscrivant dans une sorte d'anti-théâtre, elle regorge de "mots" :

« Quelque chose suit son cours » ou « Le malheur est la chose la plus comique au monde » ou alors ce glaçant « Vous êtes sur terre, c'est sans remède », qu'on croirait tout droit sorti d'une page de Cioran.

Comme la vie, la pièce est un peu longue, surtout vers la fin.

Mais le propos de Beckett, sa formidable entreprise de démolition des codes du théâtre et du langage, tout ceci garde une consistance étrange et forte.

Décor sobre, avec ses fenêtres ouvrant sur la nuit.

Soulignons le jeu inspiré de Frédéric Leidgens, parfois terrifiant, souvent d'une fragilité de verre. Denis Lavant, habité, fait plus que lui donner la réplique : les deux fonctionnent comme un duo de clowns tristes, et la pièce, plus que jamais, reste une méditation sur la vie et la mort.

Intemporelle, vraiment.

Gérard Noël

 

Fin de partie

Pièce de Samuel Beckett
Mise en scène : Jacques Osinski

Avec : Denis Lavant, Frédéric Leidgens, Claudine Delvaux, Peter Bonke

Scénographie : Yann Chapotel
Lumière : Catherine Verheyde
Costumes : Hélène Kritikos