FANNY
Théâtre Ouvert,
159 av. Gambetta,
75020 Paris.
01 42 55 55 50
Jusqu’au 23 janvier 2022.
Mardi, mercredi à 19h30.
Jeudi, Vendredi 20h30.
Samedi 18h.
Samedi 15 janvier à 18h.
Samedi 23 janvier à 20h30.
Dimanche 24 janvier à 16h
Les "premiers rôles" de femme de 55 ans sont rares. Pour en donner un à Gisèle Torterolo, le metteur en scène Rémy Barché s’est adressé à la jeune auteure québécoise Rébecca Déraspe. Ici, Gisèle n’est ni mère de, ni grand-mère de, elle est Fanny, cette femme mariée, qui accueille comme co-locataire une jeune étudiante qui va mettre à mal son petit confort étriqué; Qu’on en juge : elle va être confrontée au franc parler d’Alice. À sa façon de voir un peu différemment les choses, refusant quand le couple lui proposera de ne pas payer la chambre. Fanny sera "déçue" que la jeune fille aille si bien. Et puis Alice acceptera qu’elles sortent ensemble en boite, au grand dam de Dorian, le compagnon de Fanny. L’occasion pour Alice de décortiquer violemment le discours "machiste" d’un jeune homme qui veut s’inviter à leur table. Choc. La "disparition" d’Alice amènera Fanny à la fac’ de celle-ci pour l’y chercher. Autre choc, quand elle sera confrontée au wokisme, à la nouvelle terminologie "non-clivante" qui a (ou aurait) cours à présent.
Au final, on verra notre Fanny slamer sur une table de la cafétéria. Elle osera parler d’elle et de sa vie, elle quittera Dorian, même, histoire d’avoir, selon l’expression de Virginia Woolf, "une chambre à soi".
Tombée "en amour", malgré ses propos, Alice se retrouvera enceinte. Le rôle que Dorian jouera et toute la fin de la pièce, nous préférons vous en laisser la surprise.
Toujours est-il qu’il y aura eu, tout au long, une drôle d’évolution pour le couple, une sacré prise de conscience pour Alice et pas mal de choses, mine de rien, auront été dites.
Sur la vie, sur la jeunesse, sur l’amour, sur le vieillesse...
Rébecca Déraspe a l’art d’enchaîner les scènes en laissant les personnages aller au bout d’eux-mêmes : on sent, et c’est jubilatoire, des barrières craquer une à une. On pressent une voie qui va être prise, elle l’est, et le personnage s’aperçoit (c’est vrai surtout pour Fanny) qu’il n’y a pas de fumée sans feu, que tout se tient et qu’on n’a pas toujours, en fin de compte sur ce quoi, on comptait.
Pour une fois, les projections en fond de scène se justifient. D’abord, elles ne sont pas très nombreuses, mais la boite ou la cafèt’ n’en existent que mieux ainsi.
Mise en scène classique mais qui prend en compte la dimension du plateau et surtout le merveilleux couple Daniel Delabesse, Gisèle Torterolo. Elle surtout : femme parfois nunuche, revenu de pas mal de choses, elle se surprend et nous surprend par sa facilité d’adaptation, ses revirements, cette lassitude qui affleure entre deux emballements. Daniel Delabesse est grognon avec des pointes d’humour : quand il craque pour qu’on ne lui bousille pas son aquarium, qu’il soupire d’un air accablé ou quand il enlace sa compagne, on y croit. La jeune Elphège Kongombe renouvelle avec bonheur ce rôle (qui pouvait paraître classique) de la jeune fille en révolte. Doucereuse ou exaltée, entière dans ses convictions mais susceptible de craquer" pour une histoire d’amour, elle existe avec force et finesse.
Un spectacle drôle et émouvant. A voir.
Gérard Noël
Fanny
de Rébecca Déraspe.
Mise en scène Rémy Barché.
Avec : Daniel Delabesse, Elphège Kongombe, Gisèle Torterolo
Collaboration artistique : Alix Fournier-Pittaluga
Scénographie : Salma Bordes
Création son : Antoine Reibre
Création vidéo : Stéphane Bordonaro
Création lumières : Florent Jacob
Régie générale : François Picard
Stagiaire à la mise en scène : Mélicia Baussan, Nicolas Murena
Administration, production : Mathilde Priolet
Dffusion : Laurence Lang
Mis en ligne le 13 janvier 2022
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