Entête

AU SCALPEL

 

Théâtre des Variétés
7 Boulevard Montmartre
75002 Paris
01 42 33 09 92

Jusqu’au 30 décembre
du mercredi au samedi à 19h

 

Au scalpel loupe

Photo © Stéphane Parphot

 

L'auteur, Antoine Rault est une sorte de spécialiste de la pièce incisive, celle qui fait s'affronter souvent deux natures, deux vies, avec des enjeux forts.

Ici, ce sont deux frères auxquels il n'a pas jugé utile de donner même un prénom.

Il y a d'abord le frère UN, photographe, de guerre sans doute. Il arrive un soir chez le frère DEUX, brillant chirurgien qui n'a pas trop envie de discuter avec UN, car il doit se lever tôt le lendemain pour une opération. Mais UN insiste, il s'incruste : il aurait, prétend-il, des choses importantes à dire à son frère qui n'en peut mais. Après plusieurs verres et quelques rappels d'enfance, UN annonce la couleur : sa femme est enceinte. Et elle le quitte. Il reproche à DEUX de l'avoir débinée auprès d'elle.

C'est le moment où la pièce commence vraiment : on passera sur les fausses sorties, classiques, mais auxquelles on croit peu, car la pièce, à deux personnages, ne va pas finir au bout d'une demi-heure.

Tout y passe : les deux frères règlent de vieux comptes et sur leur vie passée, leur enfance où se répondent deux jalousies et surtout leurs relations amoureuses : UN aurait eu une relation (courte, prétend-il) avec Sarah, l'ex' de DEUX. Quant à Ariane, la femme de UN, celui-ci semble persuadé que DEUX est le père de l'enfant qu'elle attend. Les coups volent bas. Les frangins boivent encore, s'écharpent à fleurets mouchetés puis franchement, voire violemment. Le texte multiplie les injures, pas assez, peut-être : ce climat de tension que l'auteur excelle à créer, reste, sauf à la fin, dans les limites de la bienséance.

On voit bien, ou on croit voir les influences d'Antoine Rault : Le piège (ou Piège mortel) d'Ira Levin ou encore Le limier d'Anthony Shaffer. Il est des références moins enviables.

Très souvent, l'auteur se hisse à la hauteur de ces modèles. À d'autres, il se répète un peu, accumule trop de revirements et ne profite pas assez (et nous non plus) de cette cascade de surprises.

La mise en scène est fonctionnelle : on s'assied, on se lève, on fait les cent pas. La musique, bien utilisée, vient rhytmer ce duel fratricide.

Heureusement, comme souvent, il y a les comédiens : Davy Sardou est fougueux, aussi à l'aise dans la provoc',  la surenchère, que dans la lâcheté.

Gardons pour la bonne bouche Bruno Salomone dans une partition en opposition avec ce qu'on l'a déjà vu faire. Il se fond vraiment dans ce personnage carré, laissant affleurer des failles, affirmant avec aplomb qu'il est sincère, qu'il l'a toujours été... etc. Moment singulier quand il s'adresse soudain au public pour le prendre à témoin.

Gérard Noël

 

Au scalpel

Pièce d'Antoine Rault
Mise en scène : Thierry Harcourt

Avec : Davy Sardou, Bruno Salomone

Scénographie : Emmanuelle Favre, assistée d'Anaïs Favre
Lumière : Denis Korenski
Musique et sons : Tazio Caputo
Costumes : Émilie Sornique