LES GENS DE BILBAO NAISSENT OÙ ILS VEULENT
Théâtre Marigny – Le Studio
Carré Marigny
75008 Paris
01 86 47 72 77
Jusqu’au 24 novembre 2024
Du mardi au samedi à 19h
Les dimanches à 18h
En 2022, Maria Larrea publiait Les gens de Bilbao naissent où ils veulent, une autofiction dont le titre – un proverbe espagnol – place d’emblée la question de l’identité au cœur du propos. Ce livre, qui a rencontré un vrai succès et a reçu plusieurs prix littéraires, a été adapté pour la scène par Johanna Boyé et Élisabeth Ventura, et il est à présent mis en bouche par Bérénice Béjo. Elle incarne non seulement María, protagoniste et autrice du roman, mais aussi une quinzaine d’autres personnages. Ses grands-mères, Dolores et Josefa, la première qui abandonna sa fille chez les bonnes-sœurs avant de la récupérer quelques années plus tard, tandis que la seconde, qui se prostituait à Bilbao, envoya son fils chez les jésuites. Bérénice Béjo interprète aussi les parents de María, Victoria et Julián, qui avaient fui le franquisme pour s’installer à Paris.
En 1979, pour la naissance de leur fille, Victoria et Julián retournent à Bilbao : le premier enfant d’une famille basque, doit naître au Pays basque, expliquera Julián à sa fille. Si María voit le jour en Espagne, c’est à Paris qu’elle grandit, d’abord dans une petite loge du théâtre de la Michodière, où son père travaille comme gardien, puis dans la loge d’un immeuble où sa mère est concierge. María raconte les journées à Paris, l’école, la beauté de sa mère, les soirées devant la télévision mais aussi l’alcoolisme de son père, les nuits difficiles, les disputes et la violence entre ses parents, ainsi que la violence sociale qui grandit en même temps qu’elle, mettant au jour les différences avec ses copines de classe qui vivent dans de grands appartements. Et puis, il y a les étés à Bilbao où les francs se changent contre de nombreuses pesetas, rendant la famille de franchutes plus riche pour quelques semaines.
La première partie de la pièce raconte ces étapes, avec un fort ancrage dans le réel, mêlant géographie parisienne et sonorités espagnoles – avec des accents parfois un peu forcés. On est pris dans le tourbillon d’une enfance faite de joie et d’ombres et qui passe à toute vitesse, avec toujours en toile de fond cette question de l’identité. Une question qui semble faire naître l’envie de se tourner vers le cinéma. Et là, les choses prennent une tout autre tournure : à 27 ans, terminant ses études à la FEMIS, en couple et maman d’un garçon, María se rend chez une tarologue… Ce sera le point de départ d’une enquête et d’une quête identitaire, faite de test ADN, voyages en Espagne, rencontres, surprises, difficultés et questionnements.
Côté mis en scène, la sobriété l’emporte. Bérénice Béjo occupe si bien l’espace et recrée parfaitement les espaces et les lieux, qu’il n’y a besoin d’aucun artifice et peu d’accessoires pour que le spectateur soit pris dans cette incroyable histoire, racontée avec humour et émotion. Un simple rideau de fil en milieu de scène permet des jeux opportuns sur le clair-obscur, tout en servant de toile pour la projection d’images.
De l’enfant d’immigrés à la hija de nadie, la fille de personne, Bérénice Bejo reconstruit le puzzle de María, qui révèlera une sombre pratique de l’Espagne de la transition démocratique qui porte encore les stigmates du franquisme.
Ivanne Galant
Les Gens de Bilbao naissent où ils veulent
Avec Bérénice Bejo
D’après le roman de Maria Larrea (éditions Grasset)
Adaptation : Johanna Boyé et Élisabeth Ventura
Mise en scène : Johanna Boyé
Assistante mise en scène : Pauline Devinat
Scénographie : Caroline Mexme
Lumières : Cyril Manetta
Costumes : Alice Touvet
Musique : Mehdi Bourayou
Chorégraphie : Johan Nus
Vidéo : Benoit Lahoz
Photos de scène : Émilie Brouchon
Mis en ligne le 19 octobre 2024
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