Entête

LE CONSENTEMENT

 

Théâtre du Rond-Point
2 bis avenue Franklin D. Roosevelt
75008 Paris
01 44 95 98 00

Jusqu’au 6 avril
Du mardi au vendredi à 19h30
Samedi à 18h30 et dimanche à 15h30
Relâche les 17, 24 et 31 mars

 

Le Consentement loupe 

 

D’abord il y eut le livre en 2020, Le Consentement, qui fit l’effet d’un pavé dans la mare. Vanessa Springora levait le voile sur la relation qu’elle avait eue, à 14 ans, avec le célèbre écrivain Gabriel Matzneff, âgé quant à lui de 50 ans. Le texte revenait sur cette histoire de fascination, d’emprise, mettant la notion de consentement au cœur du récit.

Il y eut ensuite le théâtre, en 2022, avec la mise en scène de Sébastien Davis et l’interprétation de Ludivine Sagnier, puis le cinéma, avec le film de Vanessa Filho, dans lequel Kim Higelin et Jean-Paul Rouve interprétaient les rôles principaux. Entre temps, la pièce est partie en tournée et Ludivine Sagnier revient à présent sur les planches du théâtre du Rond-Point. Une pluralité de médias pour un même but : révéler les faits, faire circuler cette histoire, donner voix puis corps à l’expérience traumatique vécue par Springora. Faire le jour sur cette histoire, longtemps ignorée, banalisée ou même romantisée par les milieux intellectuels et littéraires.

Lorsqu’on lit et que le récit devient insoutenable, et celui-ci peut l’être, il est aisé de retourner le livre. Au théâtre, les choses sont bien différentes et l’on pourrait être réticent à rester plus d’une heure dans une salle à écouter cette histoire dont on préférerait qu’elle n’ait jamais existé. Toutefois, les temps suspendus, les silences, l’accompagnement musical de Dan Lévy à la batterie sont autant de dispositifs qui rythment la pièce, illustrent les combats intérieurs, happent le spectateur et font de ce moment un temps de compréhension et de réflexion.

La sobriété de la mise en scène est à saluer, le texte se suffit presque à lui-même et Ludivine Sagnier l’incarne, souvent les larmes aux yeux. Le jour est fait sur le passage de la fascination à la prise de conscience, et sur les conséquences de cette histoire. Elle est d’abord la jeune V. toute fascinée qu’elle était par G., défendant leur relation face à d’autres, vivant dans la chambre d’hôtel de l’écrivain à deux pas de son collège. Puis, alors qu’il le lui interdisait, elle ouvre ses livres et prend conscience de la perversité de son Pygmalion, alors que par ailleurs les visites et convocations de la brigade des mineurs s’enchaînent, sans conséquence. Elle est aussi la V. adulte désormais marquée au fer rouge par ces traumas. Les passages d’une époque à l’autre illustrent la difficile et lente prise de conscience ainsi que le malaise autour de cette notion de consentement. L’actrice incarne également une panoplie de personnages, dont G. M, et d’autres, ayant gravité autour d’elle, oscillant entre la complaisance, la violence et la fascination malsaine. 

C’est quand V. devient personnage de fiction de G. que les choses basculent, et ici aussi : la fiction et le réel se mélangent puisque Ludivine Sagnier ne se contente pas de jouer le rôle de V., elle en devient son porte-parole, et d’une certaine façon celui de toutes les autres victimes, s’inscrivant salutairement dans le mouvement #Metoo. Et l’on sent que ce qui est nécessaire est également douloureux : le soir de la représentation, juste avant le commencement, on pouvait voir dans l’ombre comment l’actrice et le musicien se serrèrent la main dans un geste qui semblait dire « Allez, vas-y, courage » . Une pièce fondamentale.

Ivanne Galant

 

Le Consentement

Texte : Vanessa Springora
Mise en scène : Sébastien Davis

Avec : Ludivine Sagnier, Pierre Belleville

Collaboration artistique : Cyril Cotinaut
Création musicale : Dan Levy
Création lumière : Rémi Nicolas
Assistante à la mise en scène : Dayana Bellini
Scénographie : Alwyne de Dardel
Assistante scénographie : Claire Gringore
Stagiaire scénographie : Sabine Rolland
Régie générale : Julien Alenda
Régie son : Warren Dongué
Directrice de production : Véronique Felenbok
Chargée de production : Aliénor Suet