QUI VA LÀ ?
Présentée à la Maison de la poésie d’Avignon (Le Figuier pourpre) le samedi 15 janvier.
La pièce de théâtre pourra être vue durant le mois de juillet 2022 au Festival Off Avignon (84)
et en octobre 2022 au Carré Rondelet à Montpellier (34)
Le spectacle est également proposé en appartement, dans les parcs et jardins, en déambulation citadine, dans les musées, les médiathèques, les bibliothèques.
Quand un acteur, Thierry de Pina, son personnage, Alexandre et un auteur, Emmanuel Darley, fusionnent, on se demande qui va là...
Une intrusion, et c’est un sentiment d'agression qui se réveille... pas vraiment, mais presque... au moins une alerte ; c’est un qui-vive qui nous saisit. Pris à partie, nous le sommes dès le départ, quasiment pris immédiatement dans un tourment. Ce que l'on ressent, en perçoit également, c’est une gêne. L’intimité créée instantanément dérange, comme nous dérangent ces hommes et ces femmes démunis que l'on voit dans la rue, sur un trottoir, nous dévoilant, montrant en un clin d'œil tout ce qu’ils ont, n’ont pas, n’ont plus, et qui par pudeur ou par gêne nous amènent à détourner la tête. Alors ils nous interpellent : j'ai mal à la tête, vous n’avez pas de l'aspirine ? …
L'histoire : c'est celle d’une perte, d’un vide, d’un rien ; ce qu'il reste après une possession, une fusion, un attachement. C’est aussi celle de l’importance d’exister, d'être, tout simplement, par soi-même et dans le regard des autres ; de parler, d’être écouté, entendu quand on est seul, que l'on n'a rien ou à peine plus qu'un nom et des papiers, le juste nécessaire pour s’assurer que l'on existe encore à ses yeux et ceux d’autrui.
C’est aussi une histoire de fuite en avant, quand il ne reste plus rien à faire qu’à partir, s’en aller, tout quitter pour échapper, ou fermer les yeux et mourir.
Alexandre, il vient d'où, il va où ? Nul ne le sait. Ce que l'on sait par contre : que le temps de cette pause ne durera pas, qu’il est seulement de passage, repartira…
De sa mère, de la perte du père, il nous apprend beaucoup ; aussi de la possession, de la fusion… Perturbé, seul, il cherche sa voie, son chemin. Mais comment le trouver quand on a perdu ses repères ? Comment échapper au passé, aux regrets, aux jugements, même après la mort de celui ou celle qui vous tourmente ? Comment faire quand des airs, des paroles de chansons, vous ramènent toujours en arrière, vers celui ou celle à qui vainement vous tentez d'échapper, tout en cherchant à vous en rappeler ? Comment se sentir libre quand on se dit qu'à la fois, habiter, être habité, c’est essentiel ?
Qui va là ? … Un personnage attachant, un acteur remarquable ; un texte et un jeu d'une sensibilité déroutante, palpable ; une fusion totale de l'ensemble dans une pièce remarquable.
Parti de son gré bien trop tôt, Emmanuel Darley témoigne dans son livre publié en 2002, de sa bienveillance envers le monde des "paumés", de sa perception des êtres en errance, ceux et celles qui n'ont pas suivi le (bon ?) chemin, restant ainsi à part, en arrière, hors les murs... si ce n'est entre les murs parfois des prisons.
Thierry de Pina, pour la Compagnie « Ah le zèbre ! » en a tiré un scénario et une mise en scène fins et subtiles qui ne peuvent faire autrement que de capter notre attention.
Qui va là ? (suivi de Pas bouger , chez Actes Sud-papiers), à lire et à voir indéniablement, pour tout cela et pour d'autres raisons sans doute qui émaneront de vous, lecteurs et spectateurs.
Catherine Giraud
Qui va là ?
D’après Emmanuel Darley, avec Thierry de Pina
Adaptation et production Ah le zèbre ! / Thierry de Pina
Attachée de presse Dominique Lhotte
Mis en ligne le 23 janvier 2022
DERNIERS ARTICLES