Entête

LA FABRIQUE DES IDOLES

 

Théâtre des Halles
Avignon

le 21 mars 2023

 

La Fabrique des idoles loupePhoto © Pablo Baquedano 

 

Imaginez ! Notre cerveau, tel un canevas géant, est capable d’enregistrer onze millions d’informations à la seconde ! La mauvaise nouvelle, c’est qu’il n’en retiendra que quarante d’entre eux.

Mais il est aussi malin le bougre, pour échapper à la débâcle du monde, il nous raconte des histoires, souvent fictives, afin de nous divertir même si elles suscitent notre réflexion. La fiction est dans nos petits mensonges, elle peuple nos rêves et culmine avec les livres, les films ou les idoles... Quel défi !

Nos trois héros nous entraînent dans une spirale infernale. Sur scène, une guitare, des pierres, un feu, des toiles imprimées. On part de la création de l’univers, en passant par le Big Bang et doucement on va voyager dans le temps. De la formation de la planète Terre, des cellules procaryotes, de l’apparition de la photosynthèse, des débuts de la vie multicellulaire, on rencontrera les dinosaures jusqu’à l’homo sapiens. Puis, de l’exode des juifs et de la création du Veau d’Or, on survolera le monde, de  la chanson de Roland à évidemment Jésus-Christ et nos croyances, le pas sur la lune d’Armstrong et même le tueur en série Charles Manson puis tant d’autres... Ce serait dommage de tout dévoiler.

C’est du théâtre inventif, subtil, original, où rien n’arrive quand et où on l’attend, et ils nous font entrer de plain-pied dans leur univers décalé avec un imaginaire ébouriffant. Notre attention est sans cesse relancée par l’apparition de ces ovnis narratifs et leur mille trouvailles visuelles qui ne nous lâchent pas. Il y a aussi des coups de dents et de griffes tous azimuts, ils s’interrogent, nous interrogent, nous rendent complices et nous font réfléchir. Pourquoi croire à toutes ces histoires et leurs idoles qui s’y rattachent ?

Une pièce parfaitement maîtrisée, forte et originale, servie par une étonnante liberté d’interprétation.

Leur énergie incroyable et leur sens du spectaculaire sont distillés comme une nappe de métal en fusion déversée sur le public. Une musique ludique, menée « guitare battant » est entourée d’une sacrée dose d’humour parfois frais ou assassin et c’est à grands traits de couleurs et d’esprit que l’on va s’immerger dans leur cosmos, dans cette créativité constante qui fait  de cette pièce un must absolu qui a réjoui le public.

Très longuement applaudi, ce spectacle est un merveilleux antidote à l’agitation du monde. Bravo à la compagnie MégaSuperThéâtre !

Fanny Inesta

 

À partir d’un postulat nous permettant de vivre, notre cerveau mettrait en place un stratagème consistant en la construction de fictions pour tisser une logique narrative donnant un sens à notre existence. Ainsi on échapperait au chaos du monde... Waouh ! c’est ambitieux.

Trois comédiens vont donc interpréter une demi -douzaine d’épisodes de l’histoire… quel pari !!!!

On démarre à la préhistoire, la création de la terre avec ses big bang à répétitions et l’apparition des êtres unicellulaires puis plus tard l’extinction des dinosaures et l’arrivée de l’homme et son évolution. Ensuite l’exode des juifs et Moïse qui récupère les tables de la loi pendant que le peuple crée le veau d’or. La vierge et le Christ… le temps passe, …le col de Roncevaux... grand épisode de l’histoire française, au moment où Roland voit qu’il va perdre la bataille et alors appelle son oncle à la recousse avant de mourir. Quelques autres moments choisis et l’alunissage d’Appolo XI... encore un grand pas pour l’humanité... etc. etc.

Une entreprise un peu démesurée qui nous entraîne sans nous demander notre avis, Nous étions venus libres et ouverts et voilà qu’on nous bouscule dans notre bienséance pour nous inculquer des à priori dévastateurs.

Ils n’y vont pas de main morte, c’est tonique, il faut suivre. Ils évoquent à partir de rien, mais leur imaginaire fuse et nous suivons.

On a pensé à la théorie de l’approche narrative de Michael White et de David Epston mais c’est une fausse route, alors où est la clé ? je ne l’ai pas trouvée mais la proposition m’est très agréable.

Trois électrons libres dont l’imaginaire est sans faille nous entraînent dans une fresque aux contours sans limites, c’est salutaire on se laisse porter, va pour la fiction.

Les trois comédiens Simon Le Floc’h, Quentin Quignon et Chloé Sarrat sont excellents, du punch, de la vitalité une belle assurance en scène. Bravo à Théodore Olivier pour sa mise en scène inventive.

Une jolie pièce originale proposée par le théâtre des Halles qui est un haut lieu de la création à Avignon.

Jean Michel Gautier

 

La Fabrique des idoles

Écriture collective : MégaSuperThéâtre
Mise en scène : Théodore Olivier

Avec : Simon Le Floc’h, Quentin Quignon et Chloé Sarrat

Dramaturgie : Romain Nicolas
Collaboratrice artistique : Mélanie Vayssettes
Régie générale : Artur Canillas
Création sonore : Clément Hubert
Lumière : Gaspard Gauthier
Scénographie : Elsa Seguier Faucher
Costumes : Coline Galeazzi
Construction : Victor Chesneau
Compagnie MégaSuperThéâtre