VENISE, RÉCIT CHANTÉ D’UN CORPS
Le 11,
11 Bd Raspail
84000 Avignon
à 17h10
Jusqu’au 21 juillet,
relâche le 15
Après dix années de théâtre et dix années de concerts, Fanny Chériaux (connue sous le pseudo Fannytastic dans le monde de la musique) crée ce spectacle qui allie les deux cordes de son arc, ou de sa lyre : jeu et chant. L’idée lui est venue lors du Grand Confinement, une idée de renouveau, de retour vers le futur, de soudaines retrouvailles avec une nature apaisée enfin. C’est en voyant les images de Venise en passe de se purifier de toutes ses pollutions, au point de voir revenir les dauphins dans une lagune redevenue cristalline, qu’une première chanson naît : Venise
Une chanson qui sera la graine d’où germera ce spectacle hybride entre concert, chorégraphie, one-woman et jeu de corps. Le corps, les corps, son corps, cela commence comme une blague. Sur scène un piano droit, tout blanc, posé sur un petit petit plateau tournant. Au piano, une femme dans une combinaison qui la couvre des pieds au cou. Elle pose. Elle prend des poses. Elle nous regarde. Elle sourit. Elle dit : « Je sais ce que vous vous dîtes. Encore une. Encore une qui se balade avec ça. Ben oui ça. Ce corps. Ce corps magnifique, sublime. Si bien proportionné… »
L’ironie est là, et l’enjeu. Car il sera bien question de corps, de corps de femmes, de cette longue et parfois difficile quête de ce corps de femme face aux changements qui le transforment, face aux injonctions que la société lui donne, face aux limites que tout corps impose à l’esprit qui voudrait parfois voler.
Spectacle libératoire, jubilatoire, entre les chansons que Fanny Chériaux interprète avec l’incroyable étendue et l’immense profondeur de sa voix, les chorégraphies et les jeux de corps qu’elle partage avec ses deux complices, danseurs et acteurs, Thomas Couppey, Sébastien Dalloni et la rugueuse réalité de ce récit qui, de tout personnel qu’il soit, fera écho aux histoires personnelles de beaucoup d’autres femmes.
Un récit qui part des origines, de la naissance, et l’accouchement aux forceps, qui décline les années d’enfance et les jeux d’insouciance jusqu’à l’adolescence fait de souffrance et de triste humiliation à cause de ce corps en pleine évolution, une récit qui trace sa route vers l’apaisement, à 45 ans, enfin, âge auquel la guerre contre ce corps, ses formes non académiques, ses élans boulimiques et ses absences de plaisir cesse enfin.
L’ironie, l’autodérision guide tout le texte de Fanny. Et un bonheur irradie de cette libération de l’esprit lorsque celui-ci accepte enfin le beauté non conforme, non reconnue par nos cultures, une beauté qui éclate dans ces danses partagées avec ses deux complices, dans ces chants et ces musiques live pleines de vie.
Avec Venise, le mètre étalon de l’esthétique vole en éclats et chaque éclat qui en résulte est mille fois plus beau, plus libre, plus vrai que l’idéal féminin étalonné. Chacun de ces éclats est une personnalité qui brille et s’affranchit et s’accepte et découvre le plaisir, la jouissance, le droit d’exister, de se montrer, d’être.
Bruno Fougniès
Venise, récit chanté d’un corps
Écriture, conception et musique : Fanny Chériaux
Mise en scène : Fanny Chériaux, Nicolas Bonneau
Interprétation : Fanny Chériaux, Thomas Couppey, Sébastien Dalloni
Création son et vidéo : Gildas Gaboriau
Création lumière : Stéphanie Petton
Scénographie : Gaëlle Bouilly
Montages sonores et vidéos : Fanny Chériaux
Création costumes : Cécile Pelletier
Regard extérieur – danse : Suzanne Dubois
Initiateur et regard extérieur : Eliakim Sénégas-Lajus
Mis en ligne le 14 juillet 2024
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