IPHIGÉNIE À SPLOTT

 

Artéphile
7 rue Bourg Neuf
84000 – Avignon

à 11h30

du 7 au 28 juillet

 

loupe 

 

Elle vit dans un quartier de Cardiff totalement sinistré, tout se délabre, les bâtiments et les êtres, on dirait du Ken Loach. Sa vie est tracée, se bourrer la gueule violemment chaque semaine pour arriver à supporter la vie. Pas d'autre espoir, pas d'autre échappatoire. Une vie au milieu de la boisson, des rots et des drogues. Pourtant un soir le rouage va se gripper, elle rencontre un ancien militaire et là tout change. Mais celui-ci n'avait pas de plans futurs avec elle car il est marié. Alors au moment où la vie prenait un sens pour elle, où elle entrevoyait une faille lumineuse, elle sombre à nouveau mais avec une nouvelle donnée : elle est enceinte, et c'est un autre combat qui commence, que faire ? Et comment faire ?

Iphigénie nous entraîne sans cesse, on prend fait et cause pour cette fille un brin agressive mais tellement engluée dans la vie, dans une vie misérable. On voudrait tant qu'elle s'en sorte, mais chaque fois c'est une nouvelle tuile qui lui tombe dessus, elle est marquée pour « la zone ». On pense à ces quartiers pourris où rien n'est possible, où le paysage est comme le ciel, un gris délavé sans espoir, sans ouverture. Tout est déglingué, les maisons, les rues, aucun commerce, les gens, aucun travail.

Iphigénie a pourtant une énergie peu commune, une volonté, un tonus. Elle va se battre.

Le décor modulaire d'Alice Yvernat et So Beau Blache maintient l'action dans un univers sombre, glacial, peu chaleureux.

Les lumières de Ivan Matthis entretiennent cet univers fermé, écorchant les êtres en leur glissant dessus.

La mise en scène de Blandine Pélissier est d'une efficacité redoutable, pas de grandiloquence, de l'efficacité, de la précision.

Enfin Morgane Peters est une Effie plus vraie que nature. Elle a la gouaille, l'insolence et la faiblesse. Elle n'est pas une actrice en scène elle est le personnage.

Elle nous entraîne derrière elle, nous fait partager son état et ses états d'âme, on est à Cardiff, on est dans la zone, on est au milieu des bouteilles vides et du vomi et on y reste car elle nous tient en haleine même si c'est une haleine de chien. On sort de là démolis c'est un rouleau compresseur cette fille.

Une magnifique pièce qui ne vous laisse pas indifférent, mais en sortant hébété vous avez le sentiment d'avoir vu une pièce qui va rester longtemps en votre mémoire. Bravo ! J'oubliais, les applaudissements furent longs et fournis l'appréciation était unanime.

Jean Michel Gautier

 

Iphigénie à Splott

de Gary Owen
traduction Blandine Pelissier et Kelly Rivière
mise en scène Blandine Pelissier

avec Morgane Peters

scénographie So Beau Blache et Alice Yvernat
création sonore Loki Harfagr
création lumières Ivan Matthis