Les Déchargeurs
3 rue des Déchargeurs
75001 Paris

Jusqu’au 25 octobre 2022
Dimanche, lundi, mardi à 19h

 

 

 

Chaque année, il paraîtrait qu’environ 10 000 personnes fassent le choix de disparaître sans prévenir, changer de vie, prendre la Tangente. C’est ce que Nina Chataignier a exploré dans son roman éponyme, adapté au théâtre par Robert Rizo.

Un jour, Noémie a traversé son jardin, franchi le portail, pris un train, puis un autre, a troqué sa vie d’épouse et de maman pour celle de serveuse dans un bar de nuit. Tel qu’elle le raconte, le désir de fuite semble s’être imposé à elle, la dépassant (bon, elle a tout de même pris le soin de vider les comptes en banque avant de partir… !). De l’autre côté, son mari, perplexe, inquiet, qui préférerait la savoir à l’hôpital, cherche des réponses : s’est-elle suicidée ? A-t-elle été enlevée ? L’a-t-elle quitté ? Pour un autre ? Et puis, il y a un troisième personnage : le débarrasseur, qu’on appelle pour éliminer ses vieux papiers compromettants ou pour organiser son propre départ. Il fournit, moyennant finance, une nouvelle vie presque clé en main.

Le sujet est original et la multiplication des voix permet d’explorer les différents points de vue. Les trois acteurs s’expriment d’abord tour à tour avant d’interagir un peu, plutôt dans la deuxième partie du spectacle : il y a le disparu, l’abandonné, le professionnel de la disparition un peu loufoque, et quelques personnages plus secondaires qui servent à faire avancer les situations. On a parfois un peu de peine à comprendre ce qui meut Noémie, et cela est sans doute normal étant donné les contradictions qui l’habitent, mais on regrette que son personnage ne suscite pas plus d’empathie. De fait, le spectateur est sans doute davantage touché par le jeu du mari. On peut saluer la mise en scène, et la présence du guitariste qui participe à créer une ambiance – à la fois envoûtante et pesante – mais de manière générale, l’ensemble est assez inégal et certains choix n’apportent pas grand-chose au propos – comme la vidéo par exemple. Il y a certes des moments d’émotions mais ils peuvent laisser parfois la place à la perplexité : que veut nous dire ce texte à propos de ce que le sociologue David Le Breton nomme la tentation de « disparaître de soi » ? En somme, une pièce qui pose des questions, mais ne donne pas forcément des réponses – ce qui est évidemment positif !

Ivanne Galant

 

Tangente

Texte : Nina Chataignier
Adaptation et mise en scène : Robert Rizo
Création lumières : Estelle Pancher
Musique : Lucas Frébourg
Vidéo : Camille Ringuet
Crédit photo : Maxime Girard

Comédiens: Justine Paillot, Édouard Michelon, Robert Rizo, Lucas Frébourg