Entête

PÉDAGOGIES DE L’ÉCHEC

 

Théâtre Les Déchargeurs
3 rue des Déchargeurs
75001 Paris
01 42 36 00 50

Jusqu’au 27 novembre 2021,
du mercredi au samedi à 19h

 

Le Prsbytère loupe 

 

Le thème de cette pièce a été inspiré à Pierre Notte par une anecdote (se situant en Italie) où après un tremblement de terre, on continuait à travailler dans les bureaux tout en voyant se monter, déjà, des échafaudages.

De là, il a imaginé un immeuble ayant subi un effondrement intérieur, une catastrophe. Tout a volé en l’air... en bas plutôt et, du septième étage, on voit par un large trou, les étages inférieurs où ont disparu meubles de bureau, dossiers, étagères, et mêmes les toilettes.

Ici, pas de décor pseudo "réaliste". On a préféré l’évocation et les comédiens rampent, titubent, se contorsionnent pour suggérer les bureaux dévastés et le danger qu’il y aurait à se pencher trop.

Dans ce bureau vont s’affronter un assistant de direction et sa supérieure.

Elle est sèche, coincée. Lui, obéissant sans être servile : une tache sur une chemise, un dossier perdu, une envie de boire... beaucoup de choses seront sujettes à conflits. Conflits qui se règlent, la plupart du temps au bénéfice de la cheffe qui a la hiérarchie pour elle. Toute la pièce est rythmée par cet affrontement : cela ne s’arrête jamais, même s’il y a des nuances et l’on verra que dans la séduction ou l’envie de faire l’amour avec l’autre, il y a aussi des enjeux de pouvoir.

Dans ce petit jeu qui commence comme un pingpong verbal et qui évolue pour atteindre des sommets de tension et d’absurde, les comédiens sont en première ligne, au même titre que le texte, brillant, de Notte.

Caroline Marchetti incarne avec force la cheffe : attachée à ses prérogatives, cinglante parfois, elle craque ou va le faire, mais se resaisit et finit en sauvant au moins les apparences. Franck Duarte est en quelque sorte le punching-ball de cette femme-cadre, l’Auguste de ce drôle de cirque : à lui la bonne volonté hébétée, les tentatives, vite avortées, de rebellion. À lui les élans qui se brisent et l’agressivité qu’il finit par exprimer  de deux coups de stylo dans la cuisse de l’autre, la supérieure, à la fois respectée et haïe.

On peut déplorer quelques longueurs en milieu de pièce, mais Notte maîtrise son sujet et l’exploite avec bonheur. Il sait rectifier le tir, nous entraînant à nouveau dans une surenchère à la fois prenante et terrifiante sur les rapports humains en entreprise... et en général.

Un spectacle recommandé, donc.

Gérard Noël

 

Pédagogies de l’échec

Texte et mise en scène : Pierre Notte

Lumières : Antonio de Carvalho

Jeu : Caroline Marchetti, Franck Duarte