LES CAHIERS DE NIJINSKI
Théâtre de la Reine Blanche,
2 bis passage Ruelle
75018 Paris
Puis en tournée
Photo Lucie Weeger
Nijinski, danseur et chorégraphe de génie, artiste maudit, a écrit ses cahiers de janvier à mars 1919. En proie à des accès mystiques, violents et poétiques, ces écrits sont les traces de la folie du danseur. Ces mots semblent l’incarnation de son ça, traversé par le prosaïsme de la vie quotidienne. L’inintelligibilité des phrases ouvre notre imaginaire à la poésie. Nijinski déverse ses blessures passées, Diaghilev est son bourreau qui l’a révélé et emprisonné. La musique de Matthieu Prual et Gaspar Claus est un élément dramaturgique qui accompagne le récit déstructuré. Ces sons deviennent les pulsions, les battements du danseur qui transcendent et complètent la limite des mots.
Denis Lavant, le circassien, incarne Nijinski, un des plus grands danseurs des ballets russes. Cela interroge. Nijinski jouait le rôle de Petrouchka, triste marionnette victime de sa vulnérabilité face au Mage. Pour rendre hommage à l’artiste, Maurice Béjart a créé le ballet Clown de dieu, les ballets russes étant représentés par un cirque. Pour tirer ce fil, au cimetière de Montmartre où repose Nijinski, une statue de Petrouchka orne sa tombe. L’entremêlement de ces deux univers ne paraît pas vain. Toutefois, l’impression de voir le génie Denis Lavant sur scène et non le fantôme de Nijinski ne cesse de nous hanter. Le comédien nous heurte avec les mots d’un autre. Pourtant, nous projetions une folie mystique dans un corps fou gardant les traces de la discipline destructrice. Le burlesque ne semble pas à sa place.
Ce spectacle nous permet de (re)découvrir la sensibilité de Nijinski marqué par l’excès du monde, meurtri dans sa propre chair par ses deux extrêmes, le génie et la folie. Denis Lavant pétrit de sa voix les mots du danseur mais nous aurions aimé voir le personnage, plus que le comédien.
Alexandra Diaz
Les Cahiers de Nijinski
Texte de Vaslav Nijinski, adapté par Christian Dumais Lvowski
Denis Lavant voix et corps
Matthieu Prual saxophone, clarinette basse et électronique, direction artistique
Gaspar Claus violoncelle et électronique
Thomas Rabillon création vidéo
Rodrigue Bernard création lumière
Mathieu Fisson création sonore
Jérémie Bélingard – danseur étoile de l’Opéra de Paris – regard chorégraphique
Mis en ligne le 12 février 2022
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