Entête

KOLIK

 

Théâtre 14,
20 av. Marc Sangnier
75014 Paris
01 45 45 49 77 

Jusqu’au 27 novembre 2021
mardi mercredi et vendredi à 20h,
jeudi à 19h,
samedi à 16h

 

Kolik loupePhoto © Ina Seghezzi

 

Étrange expérience à laquelle nous convient Antoine Mathieu, initiateur du projet (et interprète) et Alain Françon, metteur en scène. 

D’abord l’auteur : Rainald Goetz, médecin et écrivain. Il a écrit, entre autres, une trilogie dont Alain Françon a déjà, en 2004, mis en scène un épisode.

Que nous raconte Kolik ?

Un homme est en scène, dépenaillé, avec pour toute compagnie un fauteuil et une bouteille de gin ou vodka. Il en usera souvent, de façon peut-être un peu trop mécanique. L’homme, présenté comme tel sur une projection située derrière lui, l’homme philosophe. Le Je, la Force, l’Être. Il s’interroge au premier degré. Puis il envisage et se crée un autre avec lequel il va dialoguer sur le Possible et le Pas Possible. Voire le matériau "Mot".

On voit par là le côté radical de la chose : car l’auteur ne nous donne pas plus de pistes. Il ne prend pas la peine de faire exister socialement ou psychologiquement son personnage (ou si peu). La suite de la pièce est du même acabit, il y sera question de trouver un langage, un code : « Tout est descriptible », lâche-t-il.

Et de faire un détour (s’il en était besoin) vers le sexe et l’autonomie qu’il y a à vivre sans ralation. « La compassion chagrine l’esprit scientifique » entend-on également.

On entrevoit bien une piste quand le personnage évoque le suicide des siècles : dix ans avant la fin de chaque siècle, celui-ci s’effondre, avant de se suicider pour laisser la place au suivant. Et de penser fortement à son propre suicide. Il y aura aussi, à un moment, une allusion à sa vie d’enfant.

À côté de trouvailles et de poésie, que de redites et facilités : « la douleur est douloureuse » ou « le désespoir, c’est moi » ou encore « boire, c’est penser ».

On a, en bref, un long monologue qui évoque parfois Cioran... quand ce n’est pas Beckett, dont l’auteur semble s’être nourri : « Il n’y a plus rien ». « Est-ce la fin ? »

La mise en scène est minimaliste, se bornant à faire évoluer le personnage sur et autour de son fauteuil. Quand à l’interprète, loin de jouer, il adopte un ton de conférencier, l’énergie dont il fait preuve étant à mille lieu du propos, franchement désespéré de la pièce.

Alors, selon le cas, on trouvera cela longuet et facile... ou bien on se laissera prendre au côté hypnotique de la prose de Goetz, on y appréciera la philosophie et l’art de poser, sans y répondre, des questions essentielles sur la façon dont "chacun appréhende le monde".

Gérard Noël

 

Kolik

de Rainald Goetz.
Traduction : Ina Seghezzi

Jeu : Antoine Mathieu

Mise en scène : Alain Françon
Scénographie : Jacques Gabel