LA PUTAIN DE L'OHIO
La Manufacture Patinoire
2, rue des écoles
84000 Avignon
04 90 85 12 71
20h30
L'auteur israélien, Hanoch Levin n'a pas l'habitude de faire dans la dentelle. Ses pièces ont souvent suscité indignation et censure, comme « Les souffrances de Job » ou « Le patriote ».
Son univers violent, sombre, sans concession ne pouvait que séduire Laurent Gutmann, metteur en scène exigeant et audacieux.
Sur le plateau uniquement traversé de deux grandes IPN, une jeune femme dort, couchée sur une des poutres. À sa tenue, on devine la prostituée.
Puis entre Hoyamer, petit bonhomme sale et hirsute, enveloppé dans un immense imperméable kaki.
L'action est lancée, vont se succéder sans trêve une suite d'affrontements âpres et douloureux, auxquels s'ajouteront ceux du fils d'Hoyamer.
Hanoch Levin n'a pas peur des mots ni des actes, il fait fi de la bienséance et nous décoche uppercuts après uppercuts, pour mieux servir son propos désespéré. Le langage est très cru, il n'hésite pas à montrer actes sexuels et masturbation.
Éric Petit-Jean livrant ici une véritable performance d'acteur, Guillaume Geoffroy dans une composition époustouflante et Catherine Vinatier magnifique, tous se livrent sans compter et sans se ménager.
On rit malgré tout alors qu'on devrait pleurer.
Ces trois personnages, touchants dans leurs solitudes et leurs peurs nous renvoient une image de nous-mêmes sans concession évoquant les rapports à l'argent, les relations douloureuses père-fils
« Pourquoi n'es-tu plus celui que j'admirais, demande le fils, Pourquoi n'es-tu plus Dieu ? »
À quoi le père répond : « Pourquoi n'es-tu plus l'enfant aux joues roses ? »
Insensiblement l'action bascule, on ne sait plus dans quel monde on est, on ne sait même plus qui sont les personnages ni même s'ils existent vraiment.
Le rêve, l'imaginaire comme seules échappatoires possibles à un monde sordide et comme ultime pied de nez à la mort inéluctable.
Une œuvre assurément qui va diviser, faire parler, déranger, susciter enthousiasme ou rejet. Une œuvre en tout cas à laquelle on ne peut rester indifférent, portée par trois comédiens impressionnants de réalisme dans une mise en scène d'une grande violence.
Nicole Bourbon
La putain de l'Ohio
d'Hanokh Levin
Traduction Laurence Sendrowicz - Ed. Théâtrales, Théâtre Choisi V, comédies crues
Mise en scène Laurent Gutmann
Costumes Axel Aust
Lumière Yann Loric
Maquillage et perruques Catherine Saint Sever
Régie générale Armelle Lopez.
Direction de production, diffusion Emmanuel Magis/ANAHI
avec Guillaume Geoffroy, Éric Petitjean et Catherine Vinatier