J'AI TERRIBLEMENT ENVIE DE VIVRE

Théâtre du Petit Saint Martin
17 rue René Boulanger
75010 Paris
Tél. 01 42 08 00 32

Jusqu'au 31 décembre
Du mardi au samedi à 21 heures.
Matinée samedi à 16h00

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Mis en ligne le 19 septembre 2014

Cela commence par un court extrait de la Cerisaie, une réplique de Lopakhine, propriétaire terrien, petit-fils de serf et cela se termine par les derniers mots de cette même Cerisaie : « Tu n'as plus de force, il ne te reste rien, rien du tout… Eh toi !... Propre à rien ! » prononcés par Firs, le vieux serviteur de la famille, comme en superposition avec la disparition de l'auteur russe en 1904, à 44 ans.

Deux personnages issus, comme Tchekhov, de la couche la plus basse, la plus humble du peuple russe de cette fin du XIXième siècle. C'est ce Tchekhov que Bruno Abraham-Kremer raconte et met en vie ici. Un écrivain tombé presque par hasard dans l'écriture, mais aussi par nécessité, pour gagner les quelques roubles qui aideront à nourrir sa famille.

Bruno Abraham-Kremer réalise la performance d'être et de ne pas être Tchekhov dans le même instant. Il lui prête son corps et sa voix sensible. Il ne tente pas d'incarner l'auteur. Il incarne, comme une évidence, cet esprit curieux de tout, mais aussi ce terrien amusé par la vie, terriblement avide de voir, d'entendre, de découvrir le monde qui l'environne, quelqu'un en étonnement permanent, comme toujours vibrant mais toujours détaché du drame.

La scénographie de Philippe Marioge et les vidéos d' Arno Veyrat ainsi que l'univers sonore de Mehdi Ahoudig et les musiques de Ghislain Hervet agissent tous pour nous transporter avec finesse et presque volupté tout au long de ce long périple que fut la courte vie de Tchekhov. Sons, lumières et vidéos sont comme des brèches entrouvertes dans la mémoire du narrateur.

Étrangement, ce spectacle seul-en-scène n'en paraît pas un : de l'intime de Tchekhov, on s'approche si près qu'il est là devant nous entouré de ses rencontres réelles, son éditeur Souvarine, sa femme Olga Knipper, Léon Tolstoï, Maxime Gorki, Stanislavski et Meyerhold comme des personnages de son œuvre, Ivanov, Platonov, Lopakhine, Macha…

Peut-être sent-on vibrer dans ce spectacle quelque chose de spécifique à ce qu'on appelle l'âme russe : cette capacité à regarder le destin humain dans une forme d'extase fataliste et de basculer aussitôt dans une frénésie de vie incoercible, et un rire énorme et toujours jeune. Et l'on a la surprise de le découvrir ici un Tchekhov qui, à vingt ans, publiait déjà des articles et des nouvelles et qui mourut si prématurément laissant une œuvre incontournable.

De ce regard sur le monde, de cette philosophie d'assoiffé de la vie, on sort baigné non pas d'innocence mais lavé de nos peurs, confiant et vaguement goguenard vis-à-vis des drames dérisoires et pourtant stupidement tragiques de la comédie humaine.

Bruno Fougniès

 

J’ai terriblement envie de vivre

D'après les écrits de Anton Tchekhov, traduction du théâtre André Markowicz et Françoise Morvan. 
Adaptation libre et mise en scène Bruno Abraham-Kremer et Corine Juresco
Scènographie Philippe Marioge
Lumière et vidéo Arno Veyrat
Création sonore Mehdi Ahoudig
Musique originale Ghislain Hervet
Costumes Charlotte Villermet

Avec

Bruno Abraham-Kremer

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