OLGA MA VACHE

Au Lucernaire,
53 Rue N.D des Champs,
75006 PARIS
01 45 44 57 34
Jusqu'au 19 octobre, du mardi au samedi à 19h


photo© d'Eve Zheim

Depuis « Si Camille me voyait » jusqu'à « Il ne faut pas boire son prochain » on connaît le théâtre de Roland Dubillard. On l'aime. Ses « Diablogues » sont joués et rejoués un peu partout, depuis leur création par Claude Piéplu et l'auteur lui-même.

Mais Patrick Coulais a eu une idée différente, une autre envie : il a choisi un texte romanesque « Olga ma vache » pour en tirer un spectacle. On y retrouve, bien sûr, l'univers décalé et louchant vers l'absurde de Dubillard. Il y a une situation de départ étrange, un personnage (Roland lui-même) qui, lors d'un séjour à la campagne, tombe amoureux d'une vache. Et d'une vache qui parle, qui plus est. La suite est logique : Il l'emmène à Paris et elle fait ses débuts au théâtre dans un rôle taillé pour elle. Son naturel épate, forcément.  Le metteur en scène, qui est un ami prête son garage pour accueillir Olga.  

Le choix de mise en scène est de partir d'un dormeur qui se réveille. Il est allongé sur un divan  recouvert de rouge. Tout de suite, s'adressant à quelqu'un (un psy ?) il commence son récit qui renvoie, dit-il, à l'époque où il était jeune. Ce divan, seul élément du décor est transformable. Le comédien le traîne de part et d'autre, l'adapte. Comme Dubillard lui-même citant l'expression « où boivent les vaches » de Rimbaud,  qui est aussi le titre d'une de ses pièces.

Patrick Coulais a une présence et une belle énergie pour dérouler la fable, nous y plonger de façon à ce qu'on ne puisse pas douter une minute de sa réalité.. Il colle à ce qu'il raconte, ce qui pose, au passage, la question souvent évoquée de l'adaptation d'un récit sous forme théâtrale. Faute d'avoir un passé,  le personnage risque d'être « sec » dramatiquement : il peut manquer de repères sensibles et risquer de dérouter les spectateurs..

Quand le personnage exhibe des portraits d'Olga (peints par l'ami campagnard), qu'il brandit sa couverture rouge comme une muleta, quelque chose se passe, de l'ordre du théâtre. Sinon, la parole est surtout créatrice d'elle-même : elle a une force, une logique qui lui est propre et qui ne lutte pas avec la théâtralité en cela qu'elle en est différente.  Il y a aussi ce choix d'avoir fait rythmer l'histoire par un violoniste présent sur scène. L'excellent Jean Leber nous régale avec des compositions d'Eric Satie. Bon.  Il ménage des pauses, nourrit le spectacle et entretient un dialogue avec le comédien. C'est vrai. S'il y a des moments où cela « fonctionne », comme une évidence, il y en a d'autres où l'artifice n'est pas loin.

Ce spectacle s'adresse probablement aux amateurs de Dubillard. À ceux qui, désolés de ne pas pouvoir assister à une « vraie » pièce, se régalent toujours à l'écoute de sa petite musique. Elle plaira aussi à ceux qui aiment qu'on les prenne par la main pour leur raconter une histoire abracadabrantesque (comme disait aussi Rimbaud !)  qui a toutes les apparences du réel. .A ceux qui n'ont rien contre le mariage de la musique et du texte, ceux qui apprécient les comédiens conteurs inspirés et Patrick Coulais est l'un d'eux.

 

Gérard NOEL

 

Auteur Roland Dubillard

Musique d'Erik Satie

Mise en scène : Patrick Coulais & Maryvonne Schiltz

Adaptation : Patrick Coulais

Adaptation musicale : Jean Leber

Avec : Patrick Coulais, comédien & Jean Leber, violoniste