Théâtre du Pavé
34 Rue Maran
31400 Toulouse
05 62 26 43 66
Séances selon les jours 20h00, du 4 au 12 novembre 2011
Plaidoyer pour l'homosexualité ?
Ouverture porte : sur scène deux créatures; elles semblent avoir les caractéristiques qui permettent de valider le classement opéré jusqu'à présent par homo sapiens d'un côté un mâle, de l'autre une femelle, classés aussi par les civilisations sous la dénomination d'homme et de femme.
Côté jardin des voiles blanches comme des voiles de noces tombant du ciel s'étalent et esquissent un lit à baldaquin.
Côté cour, trois pieux dressés comme autant de phallus dessinent un triangle.
Le spectateur verra et entendra l'actrice, la femme, et un acteur, l'homme, raconter leur amour et surtout leurs difficultés à se faire accepter comme homosexuels par la famille et la société, énumérer les obstacles qui s'opposent à leur épanouissement mais aussi leur désir et le bonheur d'être, de vivre et d'aimer comme tout le monde. À cela, il n'y a rien à redire.
La pièce se veut didactique. Elle commence par la définition du mot homosexuel, puis égraine une liste de stéréotypes sur l'homosexualité, et enchaîne sur quelques dates clefs de la lutte des gays et lesbiennes.
Le point de vue adopté est celui des homosexuels posés comme victimes de la société patriarcale. Il est rappelé l'étymologie du mot homosexuel de homo qui veut dire le même, l'harmonie mais cependant une des voix off revendique son homosexualité comme volonté de ne pas faire partie du troupeau des hétéros.
C'est un spectacle bien sympathique mais qui ne parle malheureusement que d'une voix, celle des homosexuels, écartant donc d'emblée toute problématisation et faisant des hétéros des sans voix. C'est une reproduction du schème des hétéros qui font des homos des subalternes rejetés à sa périphérie.
Par ailleurs, quand il s'agit de répondre à la question essentielle de la procréation, ou de la perpétuation de l'espèce, la réponse suggérée est celle de l'insémination pour les couples lesbiens et aucune réponse pour les couples gays. Lorsqu'il est demandé au personnage masculin de dessiner une famille , ce dernier dessine deux femmes et au milieu un enfant à moins que ce fut deux hommes et que le trouble dans le genre soit tel qu'il n'est plus possible
de savoir qui est femelle, qui est mâle, le masculin s'étant dissout dans le féminin et réciproquement, qu'importe; le personnage féminin, en tout cas l'actrice qui a des seins, à moins que ce ne fut un transgenre, fait une croix sur l'une des figures dessinés . Est-ce à dire que le modèle de famille proposée se réduirait à une figure parentale alors que deux, le genre ne change rien à l'affaire, est déjà une réduction assez pauvre de la cellule familiale ? Ce serait bien triste car il y aurait de
forte chance de s'acheminer vers une société encore plus atomisée, une société d'individus, d'adultes enfants fragilisés, sous assistance permanente dont les gens deviendraient de plus en plus incapables de gérer la complexité des liens sociaux et les conflits qui en résulteraient ; une société de spécialistes et de patients nécessitant des soins pour tous les aspects de la vie en communauté voire dans l'espace domestique. Une société dans laquelle le besoin de sécurité serait de plus en plus en grand
afin de se protéger contre l'autre mais aussi contre soi-même qu'on ne serait plus en mesure de comprendre.
Afin qu'il n'y ait point d'ambiguïté sur ces propos et qu'ils ne soient point réduits à de l'homophobie la position tenue ici est : l'amour, le désir, la famille sont des constructions culturelles et sociales et en tant que tels ils peuvent être déconstruits, recomposés pour intégrer d'autres sexualités, d'autres modèles de famille, d'autres imaginaires.
Cependant la perpétuation de l'espèce humain ne repose pas sur l'harmonie du même mais sur le différent et de son foisonnement.
Suggérer que le problème peut être résolu par les technologies de l'humain et de la procréation assistée est une position idéologique forte, contestable et contestée, qui inscrit le genre humain dans un rapport instrumental à la nature et à lui-même, ce rapport prend place dans un contexte civilisationnel dont les valeurs sont loin d'être universelles.
Charles Zindor
Artistes : Claire Cittone, Yohan Bret
Metteur en scène : Sabrina Ahmed
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