« OSEZ DERANGER VOTRE REGARD » LE TEMPS D'UN 30'30'.

 

 

loupe 

 

 

Le « festival des formes courtes » revient du 20 au 31 janvier avec une programmation riche et exigeante. En tentant de vous proposer un panorama non exhaustif : 

L'inauguration, le 20 janvier, prendra ses quartiers à Limoges pour une première soirée performative corporelle autour des propositions « Manifeste de la manifestation », « traces », « Suite », « Quiets Motors ».

Le 24 janvier aura lieu à l'Agora de Boulazac avec une soirée acrobatique, haute en voltiges avec les spectacles « et si c'était moi », « inquiétude » et « flux tendus ».

Le mercredi 25 janvier au Cuvier – Artigues-près-Bordeaux, proposera une soirée danse entre esthétique urbaine « rencontre sur une surface plane » et énergie punk rock « tomorrowland ».

Le 26 Janvier, le festival ira à Gradignan. Dans la lignée de la programmation du lieu, Le Théâtre des 4 saisons accueillera en effet une proposition de marionnettes d'un genre nouveau avec « Milieu » et une installation où chercheurs fous manipuleront magnétophones à bandes pour une performance sonore et visuelle débridée « The wheels orchestra ».

Les 27 et 28 janvier, les festivaliers auront l'occasion de traverser la ville de Bordeaux sur des parcours-fils rouges dans plusieurs lieux pour voir les spectacles « Je suis une erreur », « Bleu », « Rue », « Traces », « CHTO interdit aux - 15ans », « Tosca », « My paradoxical Knives », « transfer », « Together till the end », « Ivo Dimchev ».

 

Enfin le festival s'achèvera à l'Avant-Scène de Cognac, entre concert percussif avec « Drum » de Brice Leroux, celui de combinaisons rythmiques et visuelles de Thomas Gérineau avec « Lumière, impact et continuité, et le travail autour des traces laissées par le son avec « trace/piano ».

 

Retrouvez la programmation détaillée :

http://www.marchesdelete.com/index.php/rencontres-du-court/2017/programmation-2017

 

Informations/réservations/tarifs & horaires de navettes gratuites.

http://www.marchesdelete.com/index.php/rencontres-du-court/2017

 

Pour sa 14 édition le festival 30'30' revient, comme à son accoutumée, avec des formes courtes et performatives. « Nouvelle Aquitaine » oblige, combinant à la fois ancrage territorial et programmation internationale, Jean-Luc Terrade, directeur artistique, a profité de l'occurrence pour étendre le réseau et faire résonner ces nouvelles écritures scéniques jusqu'à Limoges, Boulazac et Cognac.

 

Croisement entre le travail de la plasticienne Enora Lalet et celui de la graphiste Christelle Bonnet, le visuel donne le ton : un noir et blanc authentique traversé de touches jaune vif ouvre la voie d'un festival mettant à l'honneur la performance, celle héritière des années 70.

Cette édition 2017, placée donc sous le signe d'un parti pris radical et engagé, joue dans la frange entre lumières accroche-corps et ténèbres évanescentes, où les formes sculptées dans et par les clairs-obscurs scéniques reflètent dans l’œil du spectateur un ici et maintenant éphémère, reformulant son rapport au présent.

Cette année, un leitmotiv semble se dessiner autour du traitement de l'apparition et de la disparition, de la présence-absence donnant à questionner les limites et la force de l'être interrogeant tour à tour les origines, protestant contre la réalité, ou affirmant de façon plus intimiste la vulnérabilité des chairs, courant jusqu'à leur perte. Devenus supports-surfaces et/ou outils de travail, les performeurs forment et déforment ces corps, provoquent la confusion de leur propre substance, brouillent les codes, floutent les frontières disciplinaires.

 

Ces esthétiques percussives, répétitives, dansées ou encore minimalismes ainsi que ces gestes improvisés, partitions méditatives, monologues lyriques et délirants ou encore ces installations brumeuses donnent naissance à des corps artistiques dans un souffle croisant les écritures lentes et fibres  musculaires, distordant les espaces-temps pour en perturber la réception.

De traces en transes donc, sans filet sinon parfois celui des voix, les artistes brodent la fragilité de l'enveloppe corporelle dans des expérimentations souvent solitaires ou en binôme, rarement plus, jusqu'à des ritournelles franches et entêtantes transfigurant la matière autant que la forme.

Entre impact et continuité, actions suspendues, interprétations incarnées, confessions brutales, les corps et les voix, parfois aussi le geste allié au son et le son à la lumière, donnent vie à des empreintes éphémères entre expériences vaporeuses et trajectoires évanescentes faisant du spectateur un acteur privilégié.

 

Du public au spect-acteur.

 

S'appuyant sur la contrainte unique de la forme courte se jouant des codes et des conventions, le spectateur est mis à l'épreuve dans une endurance entre performance, installations sonores et visuelles, vidéo, danse, concerts, work shop, sommé d' oser dé/ranger son regard.

Au-delà des transfigurations scéniques, les lieux et différents parcours proposés sont en effet propices à perturber le public et ses conditions de réception. Poursuivant sa dynamique qui consiste à modifier les rapports, le festival bouscule l'assise confortable du fauteuil de théâtre classique pour faire éclater la salle en autant d'identités remarquables qu'il y a d'individus présents. La programmation, fonction de différents lieux et de plusieurs horaires pour un même spectacle, est étudiée pour proposer à chacun de construire son propre parcours, se déplaçant d'un endroit à un autre, dans un ballet où les spectateurs circulant selon leur propre itinéraire, se croisent et se reconnaissent. Ainsi, loin de rester simple consommateur, chacun est invité à devenir acteur de sa propre expérience à la fois singulière et unique en tant que regardeur. Ce type de situation, précisément, entend provoquer une richesse d'échanges intersubjectifs, émulsion de discussions partagées, faisant du public un groupe actif et peut-être réflexif.

 

Programmation exigeante, éclectique et inclassable, aux formats petits mais costauds, il serait encore cette année difficile de tenter d'étiqueter ce festival tant il se forge sur la marge. Au total donc on peut le résumer schématiquement ainsi : 8 soirées, 10 lieux, 28 spectacles. Entre découvertes inédites comme Hyoseung Ye, Aurélien Dougé, Pierre Yves Diacon ou d'autres figures récurrentes Ivo Dimchev, Vomir Cordeiro, Jean-Sébastien Lourdais...

 

Oserez-vous donc allez déranger votre propre regard ?

 

Cynthia Brésolin.

 

Mis en ligne le 12 janvier 2017