S/T/R/A/T/E/S – QUARTET
Théâtre Golovine
1 bis, rue Sainte Catherine
84000 Avignon
04 90 86 01 27
Jusqu’au 26 juillet à 10h45 – Les jours pairs.
Tout se joue dans un cercle tracé au sol, à la craie, ligne double évoquant la piste de cirque ou d’athlétisme, la naissance ou la planète.
Dans cet espace délimité, symbolique, autour duquel chacun des interprètes tourne l’un derrière l’autre avant aller s’installer à sa place. Sorte de parade où les regards jetés au public sont insondables.
Puis tout s’accélère, le cercle devient vertige, Bintou Dembélé tournoie de plus en plus vite jusqu’à se propulser haletante, au centre de ce cercle pendant que les mélopées entre jazz et chant traditionnel s’échappent de la bouche de Charlène Andjembé. Voix, micro, looper à la main, la chanteuse devient à elle seule orchestre, chorale. Et le Hip-hop de Bintou Dembelé y fait immédiatement écho. On sent chez la chorégraphe l’idée persistante de course – fuite ou course en avant jusqu’à l’ivresse. Sa danse à la fois d’une gracieuse douceur, préférant le plus souvent la lenteur à la syncope, et d’une tension palpable est tantôt ressentie, tantôt expression. Volonté de dire et impossibilité de dire se livrent un combat intime. Frisant parfois la pantomime, adresse directe au public, elle implore et exige.
Dans un deuxième temps, comme on passe la main à un camarade de jeu, Anne-Marie Van (Nach) investit l’espace du cercle. Danse au ton radicalement différent. Musique elle aussi différente, moins voluptueuse. Les rythmes et distorsions de la guitare électrique et des boitiers numériques de Charles Amblard entrent en jeu. Plus agressifs, rock, ils vont de pair avec le krump qui envahit de secousses la danseuse. Révolte et colère contenues semblent vouloir déchirer ses membres, s’extraire de ce corps par un moyen ou un autre comme si l’accès du langage parlé leur était interdit. Bâillonnées.
Dans des lumières ambrées, parfois rasantes, la chorégraphie de Binto Dembélé est comme un cri qui ne peut s’évader dans l’espace. Cri de révolte ou de douceur, comme le rêve d’une onde de paix qui ne vient pas. Les corps par leurs respirations deviennent eux-mêmes rythmes et musiques et la musique devient danse. C’est ainsi que s’instaure en direct le dialogue entre danseuse et musicien/chanteuse.
Lorsque les deux danseuses se retrouvent enfin réunies dans le cercle du jeu, de ces deux danses si différentes, elles tentent d’inventer non seulement un dialogue mais une expression commune qui ne soit ni l’anéantissement de l’une ou de l’autre, ni autre chose que ce qu’elles sont : une entente, un échange. D’abord, en devenant alternativement la marionnette de l’autre, puis en faisant de l’air qui les entoure le transmetteur de force jusqu’à ce que les quatre interprètes s’assemblent enfin.
Bruno Fougniès
S/T/R/A/T/E/S – Quartet
Chorégraphe : Bintou Dembélé
Musique : Charles Amblard
Voix : Charlène Andjembé
Créateur lumière : Cyril Mulon
Créateur son : Vincent Hoppe
Avec : Bintou Dembélé, Anne-Marie Van (Nach)
Mis en ligne le 28 juillet 2016