LE SACRIFICE DU CHEVAL
Le Chien qui fume
75, rue des Teinturiers
84000 Avignon
04 90 85 25 87
Jusqu’au 30 juillet
12h35
Dans un monde apparemment ordonné soudain apparaît une fissure qui va le mettre en ruine. L’ordre est un appartement visiblement habité par plusieurs colocataires. Des amis, des frères, des frères et sœurs qui se croisent et se comptent chacun l’un l’autre pour des évidences négligeables, un acquis plus que de vrais humains avec qui partager toutes ces choses merveilleuses qui sont le sel et l’or de la vie. Ils sont jeunes. Actifs ou en recherche d’emploi, étudiants éphémères ou éternels, célibataires en manque de l’autre, couples en manque de célibat.
C’est dans cet ordre instable que l’on apprend que l’eau potable vient à manquer. Pire, que l’eau de ville est un véritable poison.
On devine derrière cette histoire réaliste qui se déroule dans l’ordinaire et le banal contemporain la volonté d’en dire plus, de manière symbolique, métaphorique.
Tous les événements distillés dans l’action de la pièce de Michaël Cohen ont ainsi une double lecture : la réelle, quotidienne avec des personnages usuels sans particulières originalités, et celle, sous-tendue et amplifiée par la mise en scène Tristan Petitgirard, qui ne cesse de parler de notre monde occidental dont les lézardes commencent à ressembler à celles observées avant la chute des civilisations.
Sur les murs aux aspects de béton blanc sont projetés en rappel de la catastrophe annoncée par la pénurie d’eau, l’eau rare qui perle et s’écoule. Ces murs sont aussi ceux de cette colocation sans meubles, vides, sans aucune âme comme si tous ces locataires n’avaient pas réussi à faire naître la moindre petite parcelle de vivant dans cet espace.
En contrepoint de cette mort en attente, l’auteur fait apparaître le personnage d’une jeune femme qui contrairement aux autres, semble sans attache, et surtout avec le désir de ne s’attacher à personne. Une sorte de voyageuse, libre et libertaire qui va finir de faire tomber les murs du temple par les désirs et les incompréhensions qu’elle provoque.
Pour souligner l’aspect onirique et mettre mille millions d’années-lumière avec un théâtre que l’on pourrait prendre pour une comédie contemporaine assez légère, un musicien, Michel Deneuve intervient régulièrement, un instrument magique et qui reprend le thème de l’eau devant lui : un Orgue de cristal.
L’idée est belle, la conception est intelligente, pourtant l’amalgame entre le jeu résolument réaliste des comédiens et la vision prophétique et symbolique qui sous-tend l’histoire a du mal à créer la magie qu’on aurait pu attendre.
Bruno Fougniès
Le Sacrifice du cheval
Une pièce de Michaël Cohen
Mise en scène : Tristan Petitgirard
Assistante mise en scène : Johanna Boyé
Scénographe : Olivier Prost
Costumes : Mélisande de Serres
Vidéaste : Mathias Delfau
Chorégraphe : Mélanie Dahan
Son : Michel Winogradoff
Lumières : Denis Schlepp
Avec : Frédéric Andrau, Jérémy Bardeau, Benjamin Boyer, Marine Montaut, Fannie Outeiro, Barbara Tissier
Et Michel Deneuve à l’Orgue de cristal
Mis en ligne le 28 juillet 2016