VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT

Théâtre de l'œuvre
55, rue de Clichy
75009 Paris
01 44 53 88 88
Mardi, Mercredi, Jeudi, Vendredi, Samedi à 21h00
Samedi à 17h, Dimanche à 16h


Crédit DUNNARA MEAS

Voyage au bout de la nuit est considéré comme l'un des romans majeurs de la littérature française du vingtième siècle. Pour Nicolas Massadan, Directeur adjoint du Théâtre des Gémeaux à Sceaux, il est même « le chef-d'œuvre de la littérature française au XXème siècle ». Titulaire d'un DEA sur « La théâtralité dans le Voyage au bout de la nuit de Ferdinand Céline », il est bien placé pour pouvoir porter un tel jugement. Il était également bien placé pour en faire l'adaptation théâtrale, à la demande de Jean-François Balmer, comédien qu'on ne présente plus, ayant joué dans vingt-cinq pièces de théâtre ainsi que dans un grand nombre de films, tant pour le cinéma que pour la télévision.

Seul sur scène, il incarne Ferdinand Bardamu, porteur d'un barda qui est le poids même de toute la misère humaine qu'il rencontre au cours de son errance, et sous lequel il doit tout de même se mouvoir. Entraîné malgré lui dans des aventures qui le font mûrir en même temps qu'elles lui font perdre ses illusions, il traverse la Première guerre mondiale, l'Afrique coloniale, l'Amérique de l'entre-deux-guerres et la banlieue parisienne dans une fuite en avant qui l'emmène toujours plus loin, toujours ailleurs. Confronté à l'absurdité du monde, hostile à toute forme d'héroïsme, il érige la lâcheté en règle de conduite et dénonce les fausses valeurs que sont le patriotisme, le colonialisme et le capitalisme.

« Aux différentes étapes du voyage, indique Françoise Petit, qui signe la mise en scène et la scénographie, Bardamu tourne toujours son regard vers le ciel, lourd de masses nuageuses menaçantes, reflet de ses peurs profondes. Il faut apprendre à marcher dans le noir, d'abord à tâtons, et puis avancer coûte que coûte. C'est cette nuit-là, palpable, enveloppante, que je veux faire exister sur le plateau avec ces ciels toujours en mouvance, qui s'évanouissent et se recomposent au fil du texte et de l'action. Les ciels qui nous racontent l'implacable solitude du voyage. »

La scène est, comme il se doit, plongée dans la nuit. Au fond, un immense écran sur lequel sont projetés des ciels crépusculaires envahis de sombres nuages, troués parfois d'une lueur furtive. Un plateau nu, sur lequel se succèdent quatre éléments de décor correspondant aux quatre moments autour desquels s'articule cette entreprise de théâtralisation romanesque : la guerre, l'Afrique, l'Amérique, la banlieue. Après chaque tableau, l'éclairage disparaît pour créer un noir total permettant les changements de décor et de tenue pour le comédien.

Fortement inspiré par les expériences de l'auteur, ce roman initiatique qui donne du monde une vision bien pessimiste n'est pourtant pas dénué de comique et, malgré les horreurs racontées, le spectateur rit beaucoup, grâce, sans doute, à une mise en distance qui manie humour noir et ironie, absurde, burlesque et truculence verbale.

Quant à Jean-François Balmer, il porte, durant une heure trente-cinq, ce récit sur ses épaules avec une présence et une justesse remarquables, et on ne peut que saluer sa performance.

En adaptant ce texte, « porté par l'envie de le faire entendre au plus grand nombre », Nicolas Massadau a visiblement réussi son objectif de « restituer l'intégralité de l'œuvre dans la trame épique, picaresque qui est la sienne, et travailler avec amour dans la dentelle pour ne rien perdre du souffle – de cet à bout de souffle – qui l'a inspiré ».

 

Elishéva Zonabend

 

 

Voyage au bout de la nuit

D'après l'œuvre de Louis-Ferdinand Céline
Mise en scène et scénographie: Françoise Petit

Avec : Jean-François Balmer

Adaptation : Nicolas Massadau
Images : Tristan Sebenne
Lumières : Nathalie Brun
Son : Thibault Hédoin
Production Les Gémeaux / Sceaux / Scène Nationale & le Théâtre de l'Œuvre

 

Version PDF imprimable