TRANSSIBÉRIEN JE SUIS (Faut-il à tout prix réaliser ses rêves ?)
Du 25 au 28 février 2016 au Théâtre 13, Paris
Du 27 au 30 avril 2016 au Théâtre National de Nice – TNN
Du 11 au 14 mai 2016 au Théâtre National de Marseille la Criée
Entrée en scène cabaret, play-back Gloria, paillettes. Puis Philippe Fenwick enlève son maquillage, sa perruque, et commence à raconter. Huit ans, bon an, mal an, de train… de transe… trans ? Si ! Sibé… rien. Ou tout, pour réaliser ses rêves. Il est à l’est. Il explique. Question d’atavismes, entre autres. Autofiction d’un drôle de Peter Pan qui nous la joue aussi Wendy et fée Clochette, à sa guise, en nous embarquant vers son pays imaginaire. Mais à l’envers, tant qu’à faire : on part du fictif, de Dramatie, pour atterrir dans le réel, en Russie. Quoique… et si la fin n’était pas à Vladivostok ? Il y a les allers-retours incessants, imprévisibles… Et c’est exprès… express. Un voyage dans l’espace et dans le temps plein de surprises. 2008 à 2016, les repères sont brouillés dans la zone d’ombre pour échapper à l’utopie, ou dans la zone d’utopie pour sortir de l’ombre ?
Ambiance sombre. Un train miniature en bois n’en finit pas de rouler sur tout le devant de la scène. Début des années 80, sur les traces de Jacques Mercier, chanteur de cabaret au chômage à Brest, volatilisé de sa chambre fermée de l’intérieur. Le mystère s’épaissit lorsqu’est retrouvé son carnet de route traçant sa longue tournée en URSS, pays où il n’est jamais allé.
Côté jardin, nous découvrons Jacques Mercier hagard, son esprit s’échappe. Il est hanté par Korsakov et en développe le syndrome, v final reponctué en double f. Dès lors, ses voisins deviennent des personnages burlesques, fantasques, qui vont le happer, jusqu’au point de non retour. Un mime sort du placard, maître de cérémonie suivi de musiciens en uniformes russes qui dévoilent leur âme slave à l’accordéon, au violon, au violoncelle. Mercier chante avec rage et désespoir, passe du français au russe, et vice versa. Lors de ses visions de ses tournées sibériennes, il tombe amoureux de l’insaisissable Sonia, femme fatale et violoncelliste, qui apparaît, puis disparaît par magie, abracadabra, dans une malle. Sonia ressemble étrangement à la fille de la logeuse de Brest. Tout à coup la mère rigide et acariâtre se transforme en une créature féline qui grimpe aux rideaux… Impressionnante démonstration de tissu aérien ! Les comédiens sont aguerris, polyvalents, ils mélangent avec aisance théâtre, cirque, musique, illusionnisme, danse, en créant des séries de très beaux tableaux scéniques, qui, tels des cocktails enivrants, ravissent et surprennent les spectateurs durant une bonne heure et quarante-cinq minutes.
En parallèle, côté cour, Philippe Fenwick poursuit avec humour la narration de son parcours du combattant, des sacrifices consentis pour mener à bon port son rêve de spectacle hors normes, de ses péripéties dans les méandres impénétrables de l’administration. La route est longue et sinueuse. À force de patience, malgré les doutes, la passion obstinée finira-t-elle par aboutir à un résultat concret ?
L’histoire se poursuit encore et toujours, déborde dans le présent. Nous avons l’impression que le récit est interactif, tant le spectacle est vivant ! C’est original, extravagant, exubérant, inqualifiable. C’est dramatique, satirique, onirique aussi. Un perpétuel mouvement entre fiction et réalité. C’est peut-être cela aussi, réaliser ses rêves…
Luana Kim
Transsibérien je suis
De : Philippe Fenwick
Mise en scène : Philippe Fenwick
Avec : Philippe Arestan, Philippe Borecek, Philippe Fenwick, Nathalie Conio Hugues Hollenstein, Grit Krausse, Marine Paris, Sergueï Vladimirov
Avec la participation de : Claudine Baschet, Simone Hérault et Muriel Piquart
Collaboration à la mise en scène : Nathalie Conio
Scénographie : Philippe Fenwick et Felix Deschamps
Création Lumière : David Mossé
Création sonore et musique : Romain Quartier
Costumes : Magali Castellan
Régie Générale : Clara Marchebout
Mis en ligne le 29 février 2016