Le chevalier d'Éon. La reine Marie Antoinette. L'un qui vécut quarante-neuf ans en homme et trente-trois en femme. L'autre qui connut le destin tragique que l'on sait. Deux figures de la monarchie du XVIIIème siècle. Deux légendes.

Frédéric Mancier et Bernard Larré imaginent une correspondance entre ces deux personnages, alors que le seul lien historique connu entre eux seraient les costumes créés pour lui par Rose Bertin et payés par la reine lorsque l'ordre lui fut donné de quitter son uniforme de dragon et de ne reparaître en France que vêtu de vêtements de femme.

Ils nous font vivre ainsi vingt-trois années, de 1770 à 1793. De l'arrivée de la jeune princesse âgée de 14 ans jusqu'à sa mort sur l'échafaud.

Très documenté, le texte distille avec habileté maints détails  et évènements, nous donnant une belle leçon d'Histoire.

Mais rien d'ennuyeux là dedans. Au contraire.

Car le propos est servi par une mise en scène délicate, originale et ingénieuse et surtout une interprétation prodigieuse.

Nadine de Géa et Patrick Blandin incarnent avec une grande crédibilité leurs personnages, et on voit littéralement l'évolution de la jeune princesse un peu frivole et perdue loin de son pays natal à la maturité de la reine, mûrie par des évènements dramatiques –  la mort de deux enfants et bien sûr la Révolution –. Deux êtres incompris se dessinent peu à peu sous nos yeux au gré de réflexions et d'anecdotes, et en proie l'un et l'autre à une grande solitude.

C'est efficace, drôle parfois et émouvant, un témoignage riche et d'une grande finesse sur une période de notre Histoire avec une utilisation remarquable des costumes, partie intégrante et surprenante de la mise en scène, accompagné de musiques inspirées de Gluck, le compositeur soutenu par Marie Antoinette. Le souci du détail jusqu'au bout.

Le final est superbe, bouleversant.

Un très beau moment de théâtre qui donne envie de pouvoir modifier le cours du temps.

Nicole Bourbon

 

 

Royale légende

de Bernard Larre & Frédéric Mancier
Mise en scène : Xavier Berlioz
Musique : Anne Isabelle Devilliers assistée de Julien Beau (d'après Gluck)
Costumes : Magali Ségouin et Axel Boursier
Lumières : Philip Blandin

Avec : Nadine de Géa et Patrick Blandin