Maison de la poésie
passage Molière
157, rue Saint Martin
75003 Paris
01 44 54 53 00
Du 14 au 22 avril et du 23 mai au 3 juin 2012, du mercredi au samedi à 20 heures, dimanche à 16 heures
Spectacle interdit aux moins de 18 ans
Photo In Cauda
L'ouvrage Les Onze Mille Verges de Guillaume Apollinaire qu'il écrivit à l'âge de 17 ans, fut longtemps interdit et l'est encore d'ailleurs dans certains pays.
Faut-il voir dans ce texte sulfureux, une sorte de catalogue complaisant de toutes les perversions sexuelles, directement inspiré de Sade, scatologie, inceste, nécrophilie, meurtres et pédophilie, un exutoire de jeune homme tourmenté par l'adolescence, une farce, ou comme le disent certains un manifeste politique traçant le portrait caustique d'une Europe déclinante soumise aux intérêts personnels et aux luttes intestines ?
Godefroy Ségal, pour qui l'œuvre est à mettre en parallèle avec le Quatrevingt-treize de Victor Hugo qu'il donne en alternance à la Maison de la Poésie, liberté civique de l'une et liberté des mœurs de l'autre, a choisi de dégager plutôt la force comique du texte très rabelaisien écrit par l'auteur. Il fallait oser et être investi d'un solide sens du second degré pour se lancer dans une telle aventure.
Et de fait on rit beaucoup.
Une intelligente utilisation de l'espace scénique met immédiatement le spectateur en position de voyeur. Sous ses yeux, dans une sorte de ring clos, quatre comédiennes exceptionnelles, Géraldine Asselin, Barbara Ferraggioli, Nathalie Hanrion et Mathilde Priolet, vont mener un véritable combat, faisant vivre la prose énergique et truculente d'Apollinaire, ses personnages hommes ou femmes hors norme, ses situations délirantes en une succession de tableaux
plus fous les uns que les autres. Elles ne nous et ne s'épargnent rien, que ce soit dans les gestes ou dans la parole, elles osent tout, fidèles en tout point à Guillaume Apollinaire.
Mais la façon de balancer les mots, de les faire claquer comme des coups de fouet, de les crier ou de les chuchoter, d'en accentuer certains, marquant des ruptures inventives qui en soulignent le comique, les accompagnants de sons parodiques des films X, de jouer d'accessoires improbables avec un entrain et une bonne humeur communicatives, permet d'éviter l'écueil d'une pornographie vulgaire.
Les scènes les plus insoutenables du livre, comme le viol de bébés, ont été soigneusement évitées. Celle abominable de l'orgie nécrophile dans le train est contrebalancée par la mise en scène outrancière et l'accent mis sur le contraste entre ce que l'on voit et le tableau bucolique de la campagne allemande entrevue par les fenêtres ironiquement décrit.
Le décalage entre les situations d'une extrême cruauté et la verve jubilatoire du texte, de l'interprétation et de la mise en scène crée un spectacle d'une grande drôlerie et d'une force comique surprenante, qui est cependant réservé à un public averti et d'une grande ouverture d'esprit.
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Nicole Bourbon
Les Onze Mille Verges
de Guillaume Apollinaire
Compagnie In Cauda
Avec : Géraldine Asselin, Barbara Ferraggioli, Nathalie Hanrion et Mathilde Priolet
Scénographie : Godefroy Ségal et Benjamin Yvert
Création lumière : Émeric Thiénot et Benjamin Yvert
Costumes : Séverine Thiébault
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