ON N'EN FAIT JAMAIS TROP

Au théâtre « Le funambule »
53 rue des Saules, 75018 PARIS
Tél : 01 42 23 88 83

Au début, on craint le pire : côté décor, un canapé blanc, une petite table, la classique ambiance d'intellos bobos et des dialogues qui pourraient être drôles, parfois, s'ils étaient mieux servis. Etait-ce la faute au petit nombre de spectateurs, ce soir-là ? Toujours est-il que beaucoup de bons éléments tombaient à plat. Mais peu à peu les choses se mettent en place et l'on suit, sans déplaisir, les démêlés de cet auteur cloué sur un fauteuil roulant suite à un stupide accident de barbecue. Il y a, bien sûr, la femme aimante (même après vingt ans) le bon copain homo, responsable de l'accident, et la présence d'une infirmière qui devient vite indispensable. Elle arrive donc, belle, désirable et le cerveau enflammé de l'auteur démarre au quart de tour.

On nous dit que le jeune ( ?) auteur, Gilles Saint-Cricq a sur sa table de chevet un ouvrage sur la dramaturgie. On n'a aucun mal à le croire. L'enjeu pourrait venir un peu plus tôt mais Saint-Cricq pose bien ses jalons, « prépare » les péripéties comme il se doit et enchaîne les scènes de sorte que le spectateur attend, avec un intérêt croissant, de savoir comment tout ceci va se terminer. Rassurez-vous, nous ne dévoilerons pas la double chute de la pièce, mais, comme dit l'autre, attendez-vous à être surpris.

Il est un peu dommage que l'auteur ait laissé passer sous sa plume des phrases telles que : « Claire est une amie et je ne peux supporter qu'elle soupçonne une telle trahison ! » A côté de cela, nous avons droit à des trouvailles comme :

- Tu étais un homme heureux.

- Je ne me savais pas malheureux, nuance.

Ou bien :

- La vie, c'est comme la culture, c'est ce qui reste quand on a vécu.

 

La mise en scène de Christine Saint-Cricq joue au mieux avec le cadre de la scène. Sa direction de comédien respecte la nature de chacune et chacun : Rouée et « femme fatale » pour Charlotte Molinari qui joue l'infirmière, concrète et ambiguë pour Corinne Marsollier (l'épouse) Côté hommes, citons Bruno Uthurral, sympa, inspiré, sans en faire trop dans le rôle du copain homo qui vire sa cuti. Quant à Stéphane Blancafort, c'est lui, véritablement, qui nous fait entrer dans la pièce, avec ses éclats de rire coincés, ses élans amoureux et une douleur sourde, celle de l'homme qui s'en voudrait d'être passé à côté de sa vie. Très juste dans les scènes de séduction, ou d'énervement, il réussit à être ce personnage déchiré, constant tout en changeant subtilement d'humeur. Mais n'est-ce pas là le propre du comédien ?

 

Gérard NOEL

 

ON N'EN FAIT JAMAIS TROP, du 31 mars au 15 mai

Pièce de Gilles SAINT-CRICQ

Mise en scène de Christine Saint-Cricq