NEMA
Théâtre de Fontenay-le-Fleury
Place du 8 mai 1945
78330, Fontenay-le-Fleury.
Les 28 et 29 janvier 2016 à 20h30.
Pocket Théâtre
36 boulevard Gallieni
94130, Nogent-sur-Marne.
Du 5 au 7 février 2016, vendredi et samedi à 20h30, dimanche à 17h.
Le titre de cette pièce reprend le prénom d’un des personnages : une femme. Une femme qui cumule plusieurs étiquettes. Femme de ménage chez un couple de trentenaires cadres dynamiques et femme de son fleuriste de mari qui la bat. Une femme dont la vie est un enfer qu’elle doit cacher aux yeux des autres. Mais pour dissimuler les bleus sur son visage et ses brûlures aux mains, comment faire ?
L’histoire semble sortie d’un fait divers, de ceux dont on ne parle même plus dans les journaux tellement ils sont généralisés. En réalité, une deuxième vie intervient comme en contrepoint de cette histoire. D’un côté, un fait divers, celui de Néma, et d’un autre, l’histoire d’Idalie. Mais celle-ci est plus du registre d’un scénario fiction : Idalie vient d’obtenir un poste supérieur à celui de son mari, dans la même société… celui-ci va tout faire pour qu’elle échoue.
Toute la pièce est construite en dualité miroir : les riches cadres supérieurs et les petits, les hommes et les femmes, la boutique du fleuriste dans la rue et l’appartement bourgeois, le fait divers et la fiction, la salle à manger et l’envers du décor (la salle de bain de l’appartement bourgeois), les mots et les corps… Il y a un fleuve de silence entre tous ces reflets. Un regard vaguement intéressé, vaguement effrayé, qu’on jette à l’autre par-dessus la distance sociale. Un partage qui s’évite.
Face à ces deux femmes, les maris : tous deux vont faire preuve de violence pour conserver leurs pouvoirs.
Marie Ballet a du mal à imposer sa vision au texte de Koffi Kwahulé. Elle installe ses comédiens dans une scénographie extrêmement théâtralisée avec quelques accessoires qui servent à évoquer les différents lieux. Pourtant, dans ce décor faux, elle demande un jeu physique qui ne cesse de mettre en avant la joute charnelle et tend au réalisme.
La cause est peut-être à trouver dans le texte de Kofi Kwahulé qui regorge et bouillonne d’images extrêmement poétiques : un langage rempli de métaphores et d’un verbe résolument musical qui s’accommode mal d’un traitement trop réaliste. La violence psychologique est ici plus forte que la brutalité physique.
Néma est né d’une commande passé à l’auteur sur le thème de la violence faite aux femmes en occident. Tout est ici très codifié au point d’en devenir caricatural ce qui ôte, c’est dommage, de l’intérêt aux personnages. Ceux-ci deviennent génériques et perdent soudain leurs singularités. Même l’analyse psychologique de cette maltraitance et des rapports des personnages entre eux (entre autre avec la mère) est superficielle.
Après avoir vu et adoré Misterioso-119 du même auteur, mis en scène à la Tempête par Laurence Renn qui avait su donner aux corps de ses comédiennes un écho presque métaphysique au verbe de Koffi Kwahulé, j’avoue être un peu déçu par la portée de ce texte et de cette réalisation.
Malgré cela, les comédiens sont très investis, très pertinents dans leurs rôles. Particulièrement Jean-Christophe Folly qui possède une très belle présence et s’empare de façon convaincante du rôle difficile de Nicolas, le fleuriste au double visage : aimable poète avec la clientèle d’un côté et tourmenteur ivre de violence pour Néma de l’autre.
Bruno Fougniès
Nema
Texte de Koffi Kwahulé (Editions Théâtrales)
Mise en scène Marie Ballet
Assistée de Matthieu Fayette
Lumières Lucie Joliot
Avec
Marion Amiaud, Aurélie Cohen, Mattieu Fayette, Jean-Christophe Folly, Emmanuelle Ramu, Ombeline de la Teyssonnière
Mis en ligne le 14 décembre 2015