N’ÉCOUTEZ PAS MESDAMES
Théâtre de la Michodière.
4 bis, rue de la Michodière
75002 Paris
01 47 42 95 22
Jusqu’au 5 janvier 2020.
Du mercredi au samedi à 20h,
matinées le samedi à 16h30 et le dimanche à 15h30.
Sacha Guitry a écrit cette pièce en 1940, un bon boulevard qui aborde avec un certain détachement comique le thème qui a guidé toute sa vie. Les femmes, les mariages, les divorces, les amants, les maîtresses, les quiproquos amoureux et qui ont installé sa légende théâtrale de boulevardier reconnu. Dans cette histoire, le maître qui s’est marié cinq fois ne parlera que deux divorces mais avec toutes les ficelles d’un entremêlement plein de rebondissements.
Pendant les cinq premières minutes qu’il ne faut surtout pas manquer, c’est Daniel, grand antiquaire, bon bourgeois installé, assis sur son matelas de richesse, qui seul en scène va expliquer au public son point de vue sur le mariage et sur les femmes avec bien entendu un parfum de misogynie qui caractérisait Guitry lorsqu’il s’amusait à dire à qui voulait l’entendre : « Le mariage est une comédie mais je n’ai pas le génie de Molière ». En réalité cet antiquaire n’est autre que Guitry et c’est Michel Sardou qui s’est installé dans son costume avec son léger embonpoint et sa désinvolture nonchalante et une belle réussite d’interprétation devant il faut le dire, un public déjà conquis et aux anges. Les hommes rient et applaudissent du bout des doigts pour ne pas déplaire aux femmes qui les accompagnent et qui se révoltent un peu mais avec beaucoup de pudeur à chaque tacle misogyne que leur sert ce malicieux connaisseur de la gent féminine. Le rideau blanc s’ouvre sur un somptueux décor à deux étages de Jean Haas servi par un ascenseur et la pièce peut commencer.
Je la résumerai par une citation bien connue de l’auteur « Une femme qui s’en va avec son amant n’abandonne pas son mari, elle le débarrasse d’une femme infidèle. » car tout le thème de la pièce est dans cette réplique avec comme souvent dans le genre comédie boulevardesque une fin qui en anglais se dit : Happy End.
Dans une mise en scène très « Au théâtre ce soir » de Nicolas Briançon, Michel Sardou s’approprie le rôle avec beaucoup d’aisance et de naturel dans ce registre qui lui va bien sous le regard à la jumelle de ma voisine qui ne l’a pas lâché durant 1h35. Il est temps de parler des huit autres comédiens, magnifique brochette de talents qui donnent le rythme à l’ensemble. Je mettrais surtout en avant la sublime prestation de Lisa Martino femme et presque ex-femme de Daniel, avec une gouaille et une énergie qui laissa bien souvent pantois Monsieur Sardou, mais aussi du magnifique numéro de comédienne de Nicole Croisille, ex-maîtresse de Daniel, ex-danseuse de cancan, digne descendante de la Goulue que ce bon Toulouse Lautrec a eu la bonne idée de peindre sur une de ses toiles et aussi Patrick Raynal amant des femmes de Daniel sans savoir que son ami était leur mari. Je finirais par un petit rôle de porteur de malles avec l’excellent Éric Laugerias et son accent à couper au couteau.
Si vous cherchez un bon boulevard à voir, cette pièce en fait partie, sans aucun doute.
Patrick Rouet
N’écoutez pas Mesdames
Auteur: Sacha Guitry.
Mise en scène : Nicolas Briançon assisté de Sarah Gelle.
Avec Michel Sardou, Nicole Croisille, Lisa Martino, Carole Richert, Patrick Raynal, Eric Laugerias, Laurent Spielvogel, Michel Dussarrat, Dorthée Deblaton.
Décor : Jean Haas.
Costumes : Michel Dussarrat.
Lumière : Jean-Pascal Pracht.
Musique : Gérard Daguerre.
Mis en ligne le 10 octobre 2019