MÉNÉLAS REBÉTIKO RAPSODIE |
Au Grand Parquet
Simon Abkarian avait déjà mis en scène des spectacles, citons au hasard « Peines d'amour perdues », ou « Titus Andronicus ». Il avait déjà écrit et monté « Pénélope, ô Pénélope » en 2008. Le voilà qui a la bonne idée de récidiver avec « Ménélas ». Abkarian est comédien et quel comédien. Il a aussi pratiqué la danse et ce sont toutes ces qualités qu'il met au service de ce nouveau spectacle. L'intrigue tient dans le titre : Ménélas, frère d'Agamemnon et époux de la belle Hélène qui l'a quitté pour Pâris, pleure. Il n'a pas assez de mots pour dire sa peine. Dès le début, deux personnages en noir qui s'asseyent à une table, fument sans parole inutile tout en se servant du vin blanc (résiné) l'ambiance est créée : nous sommes en Grèce et ces hommes en costume noir et chaussures vernies sont des musiciens. Feutre baissé sur les yeux, Abkarian arrive et tout commence. Tout, c'est-à-dire la parole proférée, les accords entraînants ou tristes joués à la guitare et au bouzouki, avec traduction des paroles surtitrées. La Grèce moderne rejoint l'ancienne, dans ce dispositif minimaliste et assumé au service d'une très vieille histoire. Ce ne sont pas les trouvailles qui manquent : « Ton lit est un tombeau qui se refuse à moi ! » énonce Ménélas. Ou encore : « Ma tendre et douce femme, coryphée de mes pensées » évoque-t-il la trahison charnelle de sa chère Hélène qu'il trouve : « Il a poussé des dents au ventre de ma femme, il lui faut tout avaler ! » Après un début sobre, entrecoupé de danses, le roi se parle. S'interpelle. L'intérêt s'en trouve renouvelé, et le jeu d'Abkarian s'affine, se diversifie. Il est geignard parfois, ou tragique, bouffon, à la limite du chaplinesque, quand il évoque le moment où Hélène, parmi cent autres, l'a choisi, lui. Autre morceau de bravoure, le match entre les trois déesses (vous comprendrez en le voyant). Virtuose de l'éventail qui devient entre ses mains, poignard, chapeau, ou autre chose, Abkarian a une rigueur et un sens tragique qui émeuvent. Les deux musiciens qui l'accompagnent sont bien plus que cela : des confidents, des amis. Des partenaires qui font exister un monde autour du héros grec et de l'interprète contemporain. Donné dans la jolie salle du Grand Parquet, un spectacle qui, décidément, vaut le détour.
Gérard NOËL
Ménélas Rebétiko Rapsodie Spectacle de et avec Simon Abkarian. Musiciens : Grégoris Vassilia (chant et bouzouki) et kostas Tsekouras (guitare) Création lumières : Jean-Michel Bauer. Administrateur de production : Karinne Méraud Avril
|