MAUPASSANT – Portraits brisés

Au théâtre Essaïon
6 rue Pierre au lard
75004 PARIS
01 42 78 46 42
Tous les mercredis jusqu'au 27 mars 2013

 

Voilà donc une adaptation théâtrale, une mise en espace autour des correspondances, chroniques et œuvres de Guy de Maupassant.

« Nous désirons que l'on considère désormais Monsieur Guy de Maupassant  comme mort pour la littérature, et comme il importe avant tout de le voir vivre, nous mettons un éteignoir sur son cerveau » Germer d'Harnois de Blangues

C'est sur ces mots en voix off que débute le spectacle. Maupassant est assis dans son fauteuil, entouré des éléments de sa vie : costumes, perruques, lettres, miroir, appareil photographique, maquette du Bel-Ami, des galets. Le tout au milieu d'un univers médical, carcéral. Au terme de son existence, il va expulser, dans le désordre de son esprit pour le moins perturbé, des souvenirs, considérations et pensées, passant de la maladie aux femmes, de son image à la littérature. Il soliloque, s'adressant à son valet François Tassart, à son médecin ou à sa propre image, brisée comme son miroir.

Texte bouleversant, terrifiant, admirablement porté par Patrice Fay dont l'image, l'attitude, les accès de folie sont donnés à voir : les yeux en perpétuel mouvement, le corps partant en tous sens, la voix brusquement déchirée.

Et bien au delà de l'histoire propre de Maupassant, dont les écrits ciselés et parfois raffinés contrastent avec la grossièreté (mais pas la vulgarité)  des mots dits, c'est nous même que nous apercevons dans un « un peu plus tard » dont nous ne pouvons pas mesurer l'échéance. Certes pas forcément dans la maladie, la folie. Non, mais dans la lente dégradation des facultés intellectuelles et physiques de notre être, maintes fois couchée sur le papier par d'autres écrivains ou écrivants.

Je ne souhaite évidemment pas ici rebuter le spectateur potentiel, bien au contraire, mais prévenir qu'on ne ressort pas indemne d'un tel spectacle, si l'on a déjà, un temps soit peu, réfléchi à notre condition et son aboutissement inéluctable.

Mais c'est bien là ce qu'il me semble bon d'attendre du théâtre : un bouleversement, une secousse, une phrase ou quelques images, joyeuses ou plus tristes, mais qui resterons dans la mémoire.

Après le salut au public dans cette petite salle voûtée tout en pierre de l'Essaïon, Patrice Fay nous parle d'une biographie de 1300 pages écrite en 2012 par Marlo Johnston. Je vais m'y plonger, c'est décidé.

 

Jean-Michel Beugnet

 

Maupassant portraits brisés

Adaptation et jeu : Patrice Fay

Mise en espace : Micheline Zederman

 

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