40 comédiens sur scène, un plateau immense, 35 tableaux tous plus extraordinaires les uns que les autres, une femme à la crinière blanche assise parmi les spectateurs, une salle comble, un parfum et une atmosphère inimitable, unique, magique… Pas de doute, on est à la Cartoucherie,  au Théâtre du Soleil, et sa grande prêtresse,  Ariane Mnouchkine,  est de retour pour notre plus grande bonheur.

Après trois ans d'absence, où elle a parcouru le monde avec « ses naufragés du Fol Espoir », Ariane revient avec Shakespeare, plus précisément avec Macbeth « un des personnages les plus maléfiques de tout le théâtre » ! « Ce n'est pas le monde qui est terrifiant et sombre, mais certains êtres qui l'habitent », constate la patronne du Soleil.

« Au fond, la pièce commence dans une gloire, pendant une victoire, tout devrait aller bien, tout est doux. Mais, tout à coup il y a une avidité qui fait que le monde devient terrible. Je veux ouvrir le personnage de Macbeth aux spectateurs comme on dissèque un poisson pourri. Montrer les choses c'est déjà les changer. Les cacher c'est refuser de les voir changer».

Cet engagement à traiter des grandes questions politiques et humaines sous un angle universel, cela fait cinquante ans exactement, en ce mois de mai 2014, que le Théâtre du Soleil suit ce cap. Contre vents et marées, contre le conformisme du théâtre bourgeois, contre les injustices et toujours  aux côtés des plus faibles, Ariane Mnouchkine est  à la tête de ce vaisseau théâtral  unique en Europe. Et c'est pour cela qu'on l'aime, que le public, de génération en génération, la suit dans l'aventure du Théâtre du Soleil et la respecte infiniment. Non seulement elle n'a jamais dérogé à ses idéaux (les 75 membres de la troupe reçoivent tous le même salaire, elle comprise) mais elle offre, à chaque fois, une émotion et un éblouissement théâtral  jamais égalés.

Chaque création du Soleil est mythique et incontournable. Une fois que l'on a goûté au rituel des acteurs qui se costument et se maquillent aux yeux des spectateurs sous les gradins, à la petite restauration soignée servie par la troupe et Ariane elle même( quand elle n'est pas à la billetterie ou à l'accueil), à la magie du lieu en plein bois de Vincennes et succombé à l'envoutement de chaque mise en scène, on est converti  au Soleil pour la vie.  Né quatre ans avant mai 68, le Théâtre du Soleil est aujourd'hui l'un des derniers bastions, voire le dernier, de cette époque où l'utopie avait du sens. Ne pas connaître le Théâtre du Soleil est une lacune artistique émotionnelle abyssale, maintenant réparée ! Fréquenter ce lieu est un bonheur et un privilège à la portée de tous !

Patricia Lacan Martin

 

Macbeth

Une tragédie de William Shakespeare
Traduite et dirigée par Ariane Mnouchkine

Avec  la troupe du Théâtre du Soleil

Musique de Jean-Jacques Lemêtre