L’Étoile du Nord
16 rue Georgette Agutte, 
75018 PARIS 
01 42 26 47 47 

Jusqu’au 13 février 2016
mardi, mercredi, vendredi 20h30
jeudi 19h30
samedi 17h00

 

Photos © Virginie Puyraimond

Montesquieu, le XVIIIème siècle, les Lumières… un siècle où la raison tenta de sortir le monde de l’obscurantisme, du fanatisme et des croyances superstitieuses. Voilà une bonne raison pour extraire ces paroles des livres de l’époque pour les faire résonner avec notre XXIème siècle qui prend le chemin inverse et s’enfonce résolument vers l’idolâtrie de l’ignorance et la sauvagerie.

Roman épistolaire, le texte d’origine raconte principalement le voyage de deux amis partis de Perse (ancêtre de l’Iran actuelle) pour visiter l’Europe et principalement Paris. Par ce biais, Montesquieu, sous couvert d’anonymat (il ne se présenta que comme traducteur pour éviter la censure) amorçait une critique de la société européenne et principalement française sous le règne de Louis XIV et de la régence.

Mais cet aspect politique est laissé de côté dans ce spectacle qui se focalise sur la vision orientaliste de l’œuvre. On suit principalement, au fil des lettres, la désagrégation de l’ordre dans la maison d’Usbek, le relâchement des mœurs dans le harem laissé à la surveillance d’eunuques pour finir par la révolte des femmes et l’exigence de leurs indépendances.

Construit à partir d’un montage de certains de ces échanges épistolaires mêlé de textes contemporains, le spectacle imaginé par Guillaume Clayssen est hybride : pas totalement détaché du passé, il nous fait sautiller en permanence du XVIIIème à notre époque.

Au tout début, pour une sorte de jeu de rôle, le narrateur désigne quatre spectateurs pour interpréter le philosophe perse, son ami, l’eunuque gardien du harem et les femmes du harem. Tout au long du spectacle nous reviendrons au rappel que tout ceci n’est que jeu.

Le reste de la mise en scène use du maximum de moyens possibles mis à la disposition des créateurs du spectacle vivant actuel : Vidéo projections, webcam projections, guitare électrique, micro, mégaphone, nudité, looper, voix off, effets réverb, installations à vu et même échassière…

C’est un spectacle conceptuel, foisonnant, assez proche de la performance et hérité de ce qu’on appelait des happenings dans les années 70. Une structure construite comme un collage d’images, de sons, de proférations du texte – avec un travail très précis sur les voix et les chants d’inspiration orientale.

On y sent un désir presque sacré de montrer et de faire toucher les idées du doigt, comme cette pensée sur le concept de contemporain, contemporanéité, de Giorgio Agamben dit par un des comédiens : vraie question pour laquelle chacun trouvera peut-être sa réponse dans cette histoire.

Bruno Fougniès

 

Lettres persanes

De Montesquieu
Adaptation et mise en scène Guillaume Clayssen

Avec : Olav Benestvedt, Floriane Comméléran, Emmanuelle De Gasquet, Hugo Dillon, Nicolas Laferrerie, Eram Sobhani