Théâtre de la Tempête.
Cartoucherie
route du Champ-de-Manœuvre
75012 PARIS.
01 43 28 36 36
Jusqu'au 16 JUIN 2013
Du mardi au samedi à 20h et le dimanche à 16h

 

William Mesguish a pris le parti difficile d'adapter à la scène le roman fleuve d'Eugène Sue qui avait passionné les lecteurs de l'époque avec ses multiples rebondissements et ses personnages hauts en couleur.

J'avais personnellement en mémoire le roman qui avait enchanté ma jeunesse et surtout l'adaptation télévisuelle qu'en avait fait Claude Santelli en 1961 avec un casting impressionnant, dont les moindres n'étaient pas François Chaumette et Denise Gence, maître d'école et Chouette d'exception. Je les revois encore c'est dire.

J'attendais donc avec impatience cette adaptation théâtrale tant celle-ci me paraissait impossible à réaliser sur scène.

Mais impossible est un mot que ne connaît apparemment pas William Mesguish qui s'est lancé avec fougue et ardeur dans cette entreprise folle et à haut risque.

Disons-le d'emblée j'ai été époustouflée.

Époustouflée par le travail accompli, mise en scène audacieuse, un décor qui, nu, est sordide comme il se doit, avec de gros tuyaux rouillés disséminés sur la scène mais qui va devenir complètement flamboyant et féérique par la magie des lumières de Mathieu Coutaillier particulièrement travaillées et réussies.

L'adaptation est ingénieuse avec une sorte de Monsieur Loyal en cape et haut de forme endossés par tous les comédiens à tour de rôle dans un jeu choral bien vu rappelant le principe du feuilleton d'origine et qui font le lien entre les scènes en narrant certains épisodes.

Quant à l'interprétation ! Bluffante ! Sept comédiens seulement incarnent les 25 personnages avec un allant, un talent, une présence fascinants, aidés par les costumes et maquillages inspirés, réalisés respectivement par Alice Touvet assistée de Marion Harre et Émilie Roy et par Eva Bouillaut assistée de Noémie Beucler, me faisant presque oublier leurs prestigieux prédécesseurs. Belle scène entre autres que celle où Romain Francisco se donne la réplique à lui-même, le Chourineur profil droit, François Germain profil gauche.

C'est baroque et déjanté, avec une théâtralité poussée au maximum, quelques anachronismes, pas assez nombreux à mon avis et qui du coup paraissent plaqués, dans une sorte de mélange de Baz Luhrmann et de Tim Burton.

De la belle ouvrage donc.

D'où vient alors ce sentiment de frustation, voire de déception ?

J'ai admiré, certes, mais à aucun moment je n'ai ressenti d'émotions, je n'ai pas eu peur, je n'ai pas vibré, je n'ai pas ri, je n'ai pas pleuré. Et je me demande si les spectateurs qui ne connaissaient pas l'histoire ont réussi à en suivre le fil…

Décidément trop c'est trop, et cela rejoint ce que j'ai ressenti au cinéma devant L'écume des jours de Gondry et Gatsby de Baz Luhrmann, où la débauche d'effets techniques tuaient aussi toute émotion.

Peut-être aussi dans le cas présent parce que tellement pris et écrasé par toute la scénographie, les jeux de lumière, la bande son, le tout remarquablement réalisé comme je l'ai dit, on n'arrive plus à se concentrer sur un texte assez bavard et que surtout l'histoire paraît quand même bien démodée avec ses personnages invraisemblables et surtout sa morale poseuse égrenée à tout bout de champ, sans le recul nécessaire.

Peut-être aurait-il fallu jouer moins premier degré et partir sur une ambiance nettement plus parodique ?

C'est dommage car au vu du travail exceptionnel réalisé, on a envie de dire : tout ça pour ça !

 

Nicole Bourbon

 

 

Les mystères de Paris

Adaptation Charlotte Escamez d'après Eugène Sue
Mise en scène William Mesguich

Avec :
Jacques Courtès
Zazie Delem
Romain Francisco
Marie Frémont
Sterenn Guirriec
Julie Laufenbuchler
William Mesguich

Assistante à la mise en scène Charlotte Escamez
Scénographie et accessoires Anne Lezervant
Lumières Mathieu Coutaillier
Costumes Alice Touvet assistée de Marion Harre et Emilie Roy
Son Vincent Hulot
Maquillages Eva Bouillaut assistée de Noémie Beucler
Collaboration artistique Charlotte Escamez