LES FILLES DU TROIS ET DEMI
Théâtre Le Funambule
53 rue des Saules
75018 Paris.
01 42 23 88 83
Jusqu’au 29 janv 2019
les lundis et mardis à 21h
(relâche les 24, 25, 31 déc et 1er janv)
L'auteur est un écrivain méxicain multiprimé dan son pays. "Las chicas del Tres y media floppies" a été créé à Mexico en 2005.
La pièce se passe dans une favela, près de la frontière mexicaine. Deux personnages vont s'y côtoyer, s'y affronter... Elles sont pauvres toutes les deux, droguées. Ont des enfants... mais cela n'est pas simple, un amoureux régulier, mais c'est encore moins simple. Ces personnages n'ont pas de nom : il s'agit de "l'une des filles" et de "l'autre fille".
Une des filles est demandeuse... de coke, notamment. C'est son credo, son lietmotiv. Elle en cherche dès que l'autre a le dos tourné. Elle rêve aussi d'un toit, d'une épaule secourable, d'un peu de chaleur humaine. L'autre fille est déjà plus rangée : elle reçoit de l'argent du père de son enfant (de façon irrégulière... et intéressée), essaie de "décrocher". Elle loue un logement avec une chambre que la première, son ex-coloc', voudrait bien récupérer.
Les dialogues sont survoltés. Ça rebondit, ça cogne. Rien ne nous est épargné de leur misère tant affective que sociale, de la violence aussi qui règne autour d'elles et dont sont victimes jusqu'à leurs copines.
L'une des filles est une pauvre fille : un peu simplette, trop crédule. Vivant d'expédients et de projets illusoires (comme d'appeler sa mère pour se réfugier chez elle, mais elle perd son numéro, ou revendre des Bibles dérobées dans les hôtels et motels...) Formidable composition de Perrine Dauger. L'autre fille est jouée en alternance par Laure Portier ou bien, ce soir-là, Marjorie de Larquier. Très juste aussi.
Étonnant comme l'auteur campe avec finesse les atermoiements, les coups tordus, les "bad trips" de ces deux-là. Pour elles, il y a, comme dans les contes, trois lieux : le premier, chez l'autre fille, est un havre de paix : on peut s'y reposer, y dormir, y trouver éventuellement de la coke. Le second, une boîte, le "Trois et demi" ou tout peut arriver, le meilleur comme le moins bon. Enfin, le troisième lieu, c'est chez les "amis de Tijuana". Là, c'est bien plus dangereux, le mal les y attend mais elles finiront, bien obligées, par s'y rendre.
Nous ne dévoilerons pas le fin, signalant quand même, au passage, qu'elle aurait pu être rendue plus compréhensible en montrant la scène vide, par exemple et en utilisant des voix off.
Décor sobre mais efficace. Brillant travail sur le son, avec cette rumeur omniprésente de la ville autour d'elles, qui donne son réalisme à la pièce.
Pour toutes ces raisons... et bien d'autres, nous recommandons vivement "Les filles du Trois et demi".
Gérard Noël
Les Filles du Trois et demi
Luis E.Gutiérrez Ortiz Monasterio
Mise en scène : Davie le Rheun
Avec : Perrine Dauger, Laure Portier (en alternance avec Marjorie de Larquier)
Coordination technique : Sébastien Sidaner
Montage son : Rym Debbarh-Mounir
Idée originale de l'affiche et photo : Alexandre Liebert et Émilie Arfeuil
Mis en ligne le 22 novembre 2018