LE CHAT DU RABBIN
Théâtre des Mathurins
36 rue des Mathurins
75008 Paris
01 42 65 90 00
Jusqu’au 5 mars 2015
Du mardi au samedi à 19h00
Matinées le mercredi et le dimanche à 15h00 (mercredi : 2 représentations, à 15h00 et à 19h00)
Ce fut d’abord une BD de Joann Sfar puis un film. Et du théâtre il y a quelques années.
En voici une version mêlant plusieurs albums, qui nous vient de Suisse et qu’il est grandement conseillé de voir après ce que nous venons de vivre. C’est aux Mathurins pour soixante représentations exceptionnelles.
Car ce chat doté subitement de la parole après avoir avalé un perroquet est tout ce qu’il y a de plus subversif, de plus impertinent, posant à son rabbin de maître des questions essentielles sur la religion.
« L’Occidental veut résoudre le monde, faire de l’un avec du multiple. C’est un leurre.
— Oui, mais enfin, maître, est-ce que le judaïsme lui aussi ne cherche pas à faire de l’un avec du multiple ?
— Oui. Mais pas de la même manière. Le Logos, c’est thèse, antithèse, synthèse. Alors que le judaïsme, c’est thèse, antithèse, antithèse, antithèse... »
Mais cette fable philosophique nous donne aussi à voir l’Algérie coloniale des années 1920, avec la France qui décide des nominations des rabbins, exigeant qu’ils sachent parler et écrire le français, ce qui nous vaut une savoureuse scène de dictée, mais aussi une fraternité entre les peuples arabes et juifs. C’est un bel appel à la tolérance, à la liberté de parole, tout en tendresse, simplicité et humour et une occasion pour les profanes de découvrir un peu des coutumes juives.
Dans un décor composé d’une sorte de carriole ingénieuse, très travaillée, suggérant différents lieux, d’un bureau et de quelques tabourets, Xavier Loïra, vêtu d’une combinaison de fourrure et d’un masque qui reproduit fidèlement le dessin de la BD, campe un chat réjouissant. Passant du matou tendre amoureux de sa maîtresse au sournois filou, il tient tête à tout le monde et, doté d’un bel esprit critique, ergote à n’en plus finir, tient des raisonnements vicelards, malicieux et félin à souhait face à Jacques Maeder émouvant et paisible rabbin.
Belle idée que d’avoir introduit chants et danses qui insufflent un parfum d’Orient dans un souffle humaniste mêlé à une insolence salutaire qui provoque la réflexion sur la religion, le judaïsme, les traditions, les dogmes, la vérité, le mensonge, l’hypocrisie, les intégristes...
Une merveille de subtilité, d’émotion et d’ironie.
« Pendant longtemps, j’ai pensé qu’il était superflu de faire un album contre le racisme. Il me semblait que c’était une évidence, qu’il ne fallait pas enfoncer les portes ouvertes. Les temps changent, semble-t-il. Tout a sans doute été dit, mais comme personne n’écoute, il faut recommencer. »
Joann Sfar.
Nicole Bourbon
Le chat du rabbin
Une fable philosophique et humoristique librement adaptée de la bande dessinée de Joann Sfar par Sarah Marcuse et Xénia Marcuse.
Mise en scène Sarah Marcuse assistée de Radhia Chapot-Habbes
Composition musicale : Marc Berman
Univers visuel : Xénia Marcuse.
Avec : Pascal Berney, Rachel Gordy remplacée à partir du 20 janvier par Mounya Boudiaf, Xavier Loira, Jacques Maeder
et Marc Berman (accordéon), Guillaume Lagger (percussions et harmonica) et Ben Vicq (mandoline).
Mis en ligne le 21 janvier 2015