LE CHANT DES COQUELICOTS
Les Déchargeurs
3 rue des Déchargeurs
75001 Paris.
01 42 36 00 50
Jusqu’au 18 avril 2016
Les lundis à 19h30
Il y aurait beaucoup à dire sur la salle des Déchargeurs : la scène est petite et la vue de ce parallélépipède nu fait qu’il n’est pas évident d’entrer dans le spectacle. Note aux responsables des lumières : n’est-il pas possible d’avoir des éclairages venant du haut et faisant se dérouler l’action sur fond de nuit ?
On choisit de nous conter une histoire arrivée durant 14-18, la grande guerre, comme on dit. Un jeune homme, part se battre, laissant au village sa fiancée. Et il revient, changé. « Ce petit vieux dans ce miroir, c’est moi ? » s’interroge-t-il. Retrouvailles de courte durée, il repart. Avant, ils ont fait des projets d’avenir. On entendra la lecture des lettres qu’ils s’écrivent, et François finira par être démobilisé. Il est traumatisé, vit comme une bête, parle au ciel.
Les deux comédiens sont de formation classique, corps et voix. Ce sont des conteurs également, avec la technique y afférant. D’où un problème d’écriture : comment arriver à s’intéresser à cette histoire avec le double écart du temps (le passé) et de la personne : il dit « François » en parlant de lui, elle dit « Jeanne » en parlant d’elle. Pourquoi donc tout ce récit n’est-il pas vécu, assumé, par les comédiens ? Un brin de chorégraphie, des images corporelles travaillées ne résolvent pas la question.
La suite de l’histoire pourrait (ou aurait pu) basculer dans une sorte de fantastique beaucoup plus intéressant, ceci à partir d’une croyance relative à des poils d’ours, ou bien quand il y a cette recherche d’Abel (l’autre frère de Jeanne) Nous sortons alors un peu de l’attendu. Retour final sur la métaphore des coquelicots, qui donne son titre au spectacle.
Les comédiens ont improvisé plus ou moins, avant d’écrire ce spectacle. La volonté de ne pas emprunter à Roland Dorgelès ou Henri Barbusse, est louable. Ici, on entend : « Il siège aux côtés d’Hadès » ou bien « Dans ce labyrinthe, à qui demander son chemin, aux arbres décapités, aux cadavres démembrés ? Quel Dieu prier ? Jeanne, c’est la seule prière possible, Jeanne ».
Qu’en retenir, finalement ? Les péripéties sont fluides et les comédiens-conteurs paient de leur personne : ils bougent bien et ont chacun ou ensemble, des moments forts, des moments… théâtraux. Mais le spectateur est moins touché qu’il ne devrait par cette évocation mêlant Histoire et témoignages.
Gérard Noël
Le chant des coquelicots
De et avec Karine Mazel-Noury et Pierre Deschamps.
Mise en scène : Karine Mazel-Noury
Lumières : Mika Cousin, Loïc Laplace
Accompagnement artistique : Bernard Colin
Accompagnement chorégraphique : Muriel Corbel.
Mis en ligne le 11 février 2016