Théâtre de la Tempête
Cartoucherie de Vincennes
Route du Champ de Manœuvre
75012 Paris
Tél : 01 43 28 36 36

Jusqu’au 18 octobre 2015
du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h00.

Photo Antonia Bozzi

D’abord succès de librairie sous la forme de roman, puis succès théâtral à Londres, dans une adaptation de Simon Stephens, le texte de Mark Haddon est mise en scène aujourd’hui par Philippe Adrien. C’est un récit à la première personne racontant l’aventure d’un jeune autiste de 15 ans, Christopher, qui découvre un jour dans le jardin voisin, un chien mort, tué d’un coup de fourche. À partir de cet incident, toute une découverte de la réalité qui l’entoure va découler : les secrets du voisinage, de sa famille, de son père, de sa mère – des certitudes s’écroulent – et surtout l’occasion d’un voyage et la découverte du monde, comme si tout à coup son univers si bien ordonné, si bien protégé se démultipliait. Alors tout l’inconnu devient gigantesque et étonnant.

Il quitte ainsi, sous prétexte de découvrir qui a tué le chien, un univers clos et sécurisant pour partir seul : une sorte d’émancipation étonnante pour un autiste. Une prise d’autonomie dont il est capable grâce à une grande intelligence (intelligence qui peut friser au génie mathématique chez certains cas de personnes touchées par le syndrome d’Asperger).

Pour nous faire partager les perceptions extrêmes de Christopher, Philippe Adrien l’installe au centre d’un dispositif à l’opposé total de tout réalisme. Tout est figuré. Deux murs mobiles, une pelouse, une table, deux chaises, des tabourets et les jeux des éclairages de l’habile Pascal Sautelet suffisent à passer du jardin de la voisine à l’intérieur de la maison, de la rue de la petite ville de province au fourmillement bruyant et brutal du métro Londonien…

Un univers géométrique renforcé par les espaces lumineux eux aussi de forme géométrique, qui nous fait ressentir la manière dont un cerveau surdoué en mathématique perçoit le monde et les gens. D’ailleurs, tout le jeu des comédiens s’inscrit lui aussi dans cette rigueur mathématique : des déplacements mécaniques, à angles droits, une gestuelle rigide qui fait penser par moment à celle de Guignol, des caractères dessinés à gros traits comme ces policiers anglais beaux comme des stéréotypes.

Cet ensemble forme comme une chorégraphie totale, rythmée par les mots, les scènes courtes et l’intervention périodique d’une sorte de chœur. Mais la danse est encore plus présente grâce à l’interprétation de Pierre Lefebvre dans le rôle du jeune autiste car celui-ci alterne les scènes de jeu où son personnage est comme perclus de maladresses, de peurs et de disgrâces face au monde réel, avec des scènes presque oniriques où son corps se déploie souple, délié, aérien et se met à danser comme si soudain celui qui sommeillait en Christopher osait vivre.

Mais tous les interprètes de ce spectacle mis en scène avec une rigueur impressionnante par Philippe Adrien, sont à applaudir car ils se plient avec talent au jeu physique et rythmique qui leur est demandé.

Une dernière petite chose à noter : les inventions narratives et visuelles qui parsèment ce récit déclenchent les sourires et les rires et provoquent un afflux d’empathie pour ce jeune adolescent, sa vision du monde, sa logique surprenante, sa vérité fraîche et sans arrière-pensée.

Bruno Fougniès 

Le bizarre incident du chien pendant la nuit

D'après le roman de Mark Haddon
Adaptation Simon Stephens
Mise en scène Philippe Adrien
Texte français Dominique Hollier

Avec :
Pierre Lefebvre - Christopher
Juliette Poissonnier - Siobhan
Sébastien Bravard - Ed (le père de Christopher)
Nathalie Vairac - Judy (la mère de Christopher)
Bernadette Le Saché - Mme Alexander
Mireille Roussel - Mme Shears
Laurent Montel - Roger (M. Shears)
Laurent Ménoret - Policier
Tadié Tuéné - Révérend Peters

Décor Jean Haas
Lumières Pascal Sautelet
Assisté de Maëlle Payonne
Vidéo Olivier Roset
Assisté de Michaël Bennoun
Musique et son Stéphanie Gibert
Assistée de Farid Laroussi
Costumes Cidalia Da Costa
Assistée de Anne Yarmola
Maquillages Pauline Bry
Chorégraphie Sophie Mayer
Direction technique Martine Belloc et Erwan Creff
Collaboration artistique Clément Poirée