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À la Folie-Théâtre
6 rue de la Folie-Méricourt
75011 PARIS
Réservations : 01 43 55 14 80
Jusqu'au 12 mai du jeudi au samedi à 21h30 et le dimanche à 18h
L'atelier pièce de Jean Claude Grumberg, récompensée par plusieurs Molières, raconte l'histoire d'un atelier de couture de 1945 à 1952.
Au travers de ses personnages, c'est toute une période qui est recréée, celle de l'après-guerre, décrivant avec beaucoup de tendresse une société qui tente de se reconstruire.
On découvre ainsi les conditions de travail qui évoluent au fil des années, comme par exemple être payé à l'heure et non à l'ouvrage, l'arrivée de la mécanisation avec le développement de la concurrence.
La jeune troupe des Boss'Kapok s'en est emparée avec une fougue et une justesse étonnantes.
Dès leur entrée en scène, les comédiens nous situent leur personnage, d'un geste, d'un regard, au ton employé, on devine celle qui sera la comique, la « grande gueule » du groupe, Mimi, qu'Hélène Lausecker interprète avec un abattage qui ne se dément jamais, la coincée, Laurence, belle composition de Charlotte Forest, tenue sombre, lèvres pincées, la jeune Marie à qui May Alexandrov prête son sourire lumineux, la naïve Gisèle dont les autres se moquent,
que Gwennoline Guillemot rend infiniment sympathique .
C'est Marinelly Vaslon qui endosse le rôle central de Simone, en alternance avec Marianne Duchesne, un rôle tout en sensibilité sans jamais tomber dans la mièvrerie, elle ouvre la pièce qui se termine lorsqu'elle n'est plus là, comme si elle ne pouvait pas continuer en son absence.
Belle interprétation aussi de Dalia Bonnet (également à la mise en scène) et de Bruno Sultan, respectivement Hélène et Léon, les patrons, elle, réfugiée en zone libre pendant la guerre et hantée par l'idée que l'on puisse oublier, lui refusant de se laisser envahir par le passé, par l'émotion, seul moyen de survivre, de faire taire la colère. Ils sont magnifiques et bouleversants dans la scène où Hélène explose quand elle voit sur l'acte de décès du mari de Simone « Mort
à Drancy » : (« mais si ça n'existe pas sur leurs papiers, avec tous les tampons et toutes leurs signatures officielles[
]. Alors personne n'est parti là-bas, personne n'est jamais monté dans leurs wagons, personne n'a été brûlé ; s'ils sont tout simplement morts à Drancy, ou à Compiègne, ou à Pithiviers, qui se souviendra d'eux ? Qui se souviendra d'eux ?»)
Victor Le Lorier crée lui avec le même bonheur deux personnages à l'opposé l'un de l'autre, Le presseur, le seul personnage à n'avoir pas de nom, à pouvoir témoigner des camps, marqué à jamais par cet épisode et Max la représentation du commerce.
Victor Veyron est lui le deuxième presseur, appartenant à une cellule communiste, incarnant posément l'avenir et les avancées sociale, il donne épaisseur et profondeur à son personnage.
La mise en scène précise de Dalia Bonnet et Coralie Paquelier laisse toute sa place au poids des mots, tout en courtes répliques, qui confèrent un grand dynamisme au dialogue, dans un langage parfois allégorique qui fait sourire alors même qu'il évoque une réalité douloureuse, éclairant de manière fugace des histoires d'autant plus terribles qu'elles sont banales.
Car l'humour est bien présent, voile de légèreté posé sur un passé tragique, tenant le pathétique à distance.
Les années passent rythmées par les chansons accompagnées à l'accordéon par Laura Domenge à la belle présence.
Mais la relève est assurée et la foi en l'avenir se dessine grâce à la naissance du bébé de la jeune Marie et l'apparition finale du fils de Simone.
On sort de là conquis et émus par toute l'humanité qui se dégage, un vrai bain de fraîcheur malgré la dureté du sujet : les personnages savent que c'est dans cet atelier qu'ils peuvent compter l'un sur l'autre, Simone avoue que c'est là qu'elle peut se changer les idées.
Nicole Bourbon
L'Atelier
De Jean Claude Grumberg
Mis en scène par Dalia Bonnet, Coralie Paquelier assistées de Marinelly Vaslon
Avec Bruno Sultan, Dalia Bonnet, Hélène Lausecker, Charlotte Forest, Marinelly Vaslon, Marianne Duchesne, Victor Veyron, Victor Le Lorier, May Alexandrov, Gwennoline Guillemot, Laura Domenge
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