L'AMOUR EXISTE |
La Folie-Théâtre Jusqu'au 21 octobre 2012. Jeudi, vendredi, samedi à 21h30 et dimanche à 18h. Pièce étrange et forte, qui se donne depuis peu à la Folie-Théâtre. Au début, tout semble normal ou à peu près : un homme qui a provoqué un accident de la route, est interrogé par une femme. Est-elle policière, psychologue ? Ces doutes seront levés en temps utile. L'histoire se passe en Allemagne, dans un petit village. Il est question, assez rapidement, de la vie du personnage masculin, de son ex-femme, de sa mère, également, qui habite non loin de là et qui aurait rejoint un genre de secte. À coup de questions, la femme, peu à peu, arrive à vaincre ses réticences à lui, à le faire dépasser ces oublis qu'il attribue au choc de l'accident. L'homme, nerveux, aux abois, proteste de sa bonne foi. Il voudrait s'en aller. La femme, qui tisse autour de lui une toile d'araignée d'interrogations, l'amènera peu à peu, à confier,… l'indicible. Il suffira d'un aveu, un seul, mais d'importance, pour que la digue se fissure et que le reste suive. Et la vérité se fait jour, …elle n'est pas jolie. Nous choisissons de ne pas la révéler ici mais le rouge de l'affiche, ainsi que l'écriture enfantine du titre pourraient mettre sur la voie. Ce huis clos psychologique n'est ni complaisant ni intellectuel. L'auteur, Mitch Hooper, reste au plus près de ses personnages. Aucun n'est parfait. Chacun a sa faille et la femme n'hésite pas, pour vaincre les réticences de l'homme, à lui livrer quelques éléments de sa propre vie. Quelqu'un disait, en sortant du spectacle, que ce type d'interrogatoire ne serait pas possible en France. Peu importe, puisqu'il se déroule de l'autre côté du Rhin. Et puisque l'histoire nous intrigue tout d'abord, nous prend rapidement aux tripes et ne nous lâche plus jusqu'à la fin. Un spectacle court mais dense, où la musique joue son rôle, de même que la découpe en petites séquences où l'éclairage change avant de reprendre pour une autre série de révélations. Si comme l'auteur le déclare, cette œuvre est le fruit d'une commande, on peut dire que le pari est largement gagné. Pour cette reprise, les metteurs en scène se sont mis à deux, Thierry Mourian et Christine Casile et leur travail est des plus efficaces. Anguleuse et toute vêtue de noir, la femme est jouée par Florence Gout. Féline, elle dose douceur et menace. Elle veut savoir : non que cela lui plaise, mais elle le doit. On sent un fatalisme, tout un monde en marche derrière elle et qui s'oppose à cette autre fatalité qui a mené l'homme là où il en est. Bien sûr, la pièce fait réfléchir sur le bien, le mal, …le hasard. Et sur le déni, dans lequel s'enferme l'homme. Dans ce rôle, Patrick Della Torre est fascinant. Il colle complètement au personnage, avec sa faiblesse, ses coups de gueule et sa résignation finale. Il laisse aussi planer mystère et non-dits. Du grand art.
Gérard Noël
L'amour existe de Mitch Hooper avec Florence Gout et Patrick Della Torre. Mise en scène de Thierry Mourian et Christine Casile.
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