KANATA - ÉPISODE 1 - LA CONTROVERSE
Théâtre du Soleil
Cartoucherie de Vincennes
route du Champ de Manœuvre
75012 Paris
Tel : 01 43 74 24 08
Jusqu’au dimanche 17 février
Du mercredi au vendredi 19h30, samedi 16h, dimanche 13h30, relâche lundi, mardi et mercredi 2 janvier (jusqu’au 13 janvier)
Du Mardi au vendredi 19h30, samedi 16h, dimanche 13h30 relâche lundi (à partir du 15 janvier)
Il pleut sur Vancouver. L’eau dégouline lentement sur les vitres industrielles du loft où s’installe un jeune couple de Français, nouveaux venus dans la ville : un comédien en mal d’Hollywood et une peintre en creux d’inspiration.
Il pleut aussi dans la rue et les ruelles en bas : Hasting Street est une cour des miracles qui survit par vents et pluies, entre les ventres des poubelles, les ventes et les vols à l’arraché, les échanges de seringues à la pharmacie alternative… Héroïnomanes, dealers, voleurs et autres sans domicile, toute la marge de la société canadienne est concentrée là. Un microcosme multiethnique où se retrouve une partie des autochtones du continent nord-américain que l’État a jusque dans les années 90, contraint, éteint ou éduqué dans des pensionnats (Cent cinquante mille enfants subirent l’assimilation forcée via des pensionnats chrétiens financés par le gouvernement). La perte de ses repères mène au chaos.
Au travers une trame dramatique actuelle, Kanata (qui signifie village en Huron) s’intéresse aux mises au rebut de ceux qui sont issus des Premières Nations du Canada.
La mise en œuvre de la pièce s’appuie en premier lieu sur la richesse humaine de la nombreuse troupe de comédiens du théâtre du Soleil d’Ariane Mnouchkine – ils sont plus de trente au plateau -, mais aussi et essentiellement sur une scénographie imposante et des projections vidéos très léchées. Le travail de création des visuels, les changements de décors et globalement la création des images et des différents lieux où se déroulent les actions sont d’une impressionnante efficacité. Le modèle des téléséries est clairement présent dans l’intention de créer un réalisme susceptible de toucher et de donner une vérité aux personnages, aux scènes et à l’histoire.
La maîtrise de ces images est la plus grande force de Kanata. Images réalistes auxquelles il faut ajouter les trois scènes, magnifiques, élégiaques, inspirées qui échappent au réel et nous emportent en poésie vers l’éternel pays des rêves. Un grand bonheur que ces instants métaphoriques existent pour donner au spectacle une dimension autre qu’un documentaire scénarisé.
L’argument de la pièce se veut très simple. Robert Lepage a intégré dans l’histoire les réponses aux critiques qui lui sont faites depuis deux ans au sujet de la production de son spectacle en développant tout un discours assez convenu sur la liberté de l’artiste, ce qui déplace le propos et fait dériver l’interrogation initiale vers un problème plus général de la représentation artistique.
Reste que les qualités de la mise en scène et du jeu des acteurs sont comme des gourmandises qu’il fau aller savourer. Le spectacle est grand, vu comme sur écran panoramique, avec une générosité sans faille et, ce qui cicatrise tout, des comédiens et une virtuosité scénique fascinante.
Bruno Fougniès
Kanata - Épisode 1 - La Controverse
Mise en scène, Robert Lepage
Dramaturgie, Michel Nadeau / Direction artistique, Steve Blanche, Ariane Sauvé, avec Benjamin Bottinelli, David Buizard, Pascal Gallepe, Kaveh Kishipour, Étienne Lemasson, Martin Claude et l’aide de Judit Jancso, Thomas Verhaag, Clément Vernerey, Roland Zimmermann
Peintures et patines, Elena Antsiferova, Xevi Ribas, avec l’aide de Sylvie Le Vessier
Lumières, Lucie Bazzo, avec Geoffroy Adragna, Lila Meynard
Musique, Ludovic Bonnier
Son, Yann Lemêtre, Thérèse Spirli, Marie-Jasmine Cocito
Images et projection, Pedro Pires, avec Étienne Frayssinet, Antoine J. Chami
Surtitrage, Suzana Thomaz
Costumes, Marie-Hélène Bouvet, Nathalie Thomas, Annie Tran
Coiffures et perruques, Jean-Sébastien Merle
Assistante à la mise en scène, Lucile Cocito
Avec les comédiens du Théâtre du Soleil, Aref Bahunar, Taher Baig, Shaghayegh Beheshti, Duccio Bellugi-Vannuccini, Aline Borsari, Sébastien Brottet-Michel, Saboor Dilawar, Eve Doe Bruce, Ana Dosse, Maurice Durozier, Man WaïFok, Astrid Grant, Camille Grandville, Sayed Ahmad Hashimi, Martial Jacques, Sylvain Jailloux, Dominique Jambert, Seear Kohi, Shafiq Kohi, Agustin Letelier, Vincent Mangado, Andrea Marchant, Jean-Sébastien Merle, Alice Milléquant, Nirupama Nityanandan, Miguel Nogueira, Ghulam Reza Rajabi, Omid Rawendah, Samir Abdul Jabbar Saed, Arman Saribekyan, Wazhma Totakhil, Luciana Velocci Silva, Frédérique Voruz
Mis en ligne le 26 décembre 2018