JUDITH (le corps séparé)

MC 93
9 Bd Lénine
93000 BOBIGNY
01 41 60 72 72
Du 24 mai au 9 juin 2013, à 20h30, les lundis, vendredis et samedis. À 19h30 les mardis., 15h30 les dimanches.

Judith

On pourrait rapprocher l'auteur, Howard Baker, d'un écrivain comme Heiner Muller : dans les deux cas, il y a réappropriation, soit d'un thème déjà traité, soit d'un mythe. Ici, c'est la Bible qui est mise à contribution. Baker s'empare de la confrontation entre Judith, envoyée par les Juifs de Béthulie et le terrible Holopherne, général assyrien qui se prépare à une bataille fatale qui lui permettra de les exterminer. En une nuit, la donne va changer. Qui ne se souvient du tableau, des tableaux plutôt, où l'on voit Judith s'apprêtant à poignarder Holopherne ?

Ce qui intéresse l'auteur, c'est le comment. Les phases de la rencontre qui vont mettre le tyran à la merci d'une femme et de celle-ci en particulier. Il y aura des hauts, des bas, des cris, des soupirs, des confidences. Des silences aussi. « Je parle trop ? » demande Judith à un moment. La suivante jouera son rôle. Au-delà des deux figures principales, ce sont les êtres que Baker interroge et fait réagir. Il nous les montre dans des élans, humains parfois, mais qui souvent les dépasse. On pourrait juste déplorer l'emploi, parfois, d'un argot très contemporain, qui fait, à bon compte, s'esclaffer le public.

Le décor est sobre, dépouillé, sur la grande scène de la MC 93. Par terre, du sable brookien. Les costumes sont atypiques, mélange de moderne et d'antique. Ce n'est évidemment pas un hasard si les premières paroles d'Holopherne concernent la mort, s'il s'interroge sur elle avec le visage reflété dans un miroir. Et puis Judith arrive. C'est une veuve. Elle a une beauté altière et une voix qui s'écaille. S'étoile. Il y aurait beaucoup à écrire sur la voix d'Anne Alvaro, bouleversante interprète du rôle-titre. La suivante apporte un contrepoint parfois comique. Vivant, en tout cas. Elle est le ludion extérieur, elle peut provoquer ou inciter, commenter drôlement l'action ou en être, vers la fin, la principale responsable. Quand tout est achevé, quand, fidèle au mythe, la tête d'Holopherne git au sol enveloppée d'un linge, c'est à une terrible scène qu'on nous convie. Comment Judith, paralysée, va reprendre l'avantage, comment elle va arriver à incarner (avec les excès que l'on craint) l'héroïne que son peuple attend.

Dans le rôle du tyran, Hervé Briaux est saisissant. Il a pour lui son physique et son jeu brutal, qui fait alterner grondements et douceur. Il incarne on ne peut mieux les méandres et mystères de son personnage. Belle présence de Sophie Rodrigues, à la fois légère et tragique. La « jeune » metteuse en scène Chantal de la Coste a fait un travail remarquable, il faut le dire.

Voici une pièce que nous recommandons…évidemment.

 

Gérard NOËL

 

 

Judith, le corps séparé

Mise en scène, scénographie et costumes : Chantal de la  Coste

Avec Anne Alvaro, Hervé Briaux, Sophie Rofrigues

Traduction : Jean-Michel Déprats
Dramaturgie : Daniel Loyaza
Création son : Etienne Dusard
Création lumières : Pascal Alidra-Biron
Assistante à la mise en scène : Elise Boch
Stagiaire assistante à la mise en scène : Natacha Steck
Stagiaire à la scénographie : Tristan Ortlieb

 

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