La Pépinière Théâtre
7 rue Louis Le Grand
75002 Paris
Tél. 01 42 61 44 16

Jusqu’au 16 décembre 2017
de mardi à vendredi à 21h00
le samedi à 16h00 et 21h00

 

 Crédit photos  Alejandro Guerrero

D’emblée, les comédiens sont là, l’un d’eux prend directement le public à partie. Le personnage est fort sympathique, il laisse entrevoir ses failles : Richard se présente ainsi comme un metteur en scène en manque de travail qui doit accepter, par nécessité, de donner des cours de théâtre dans une “maison centrale”, prison dont les détenus purgent de longues peines et/ou ils sont particulièrement difficiles. Il est assisté d’une comédienne (son ex-femme) et d’une jeune stagiaire assistante sociale. À ce premier cours ne sont présents que deux prisonniers, l’un jeune, tout feu tout flamme et ingérable, l’autre âgé, impénétrable et taciturne. La tâche n’est pas facile pour Richard, comment va-t-il sortir de ce huis clos surréaliste, improbable ? En sachant que les apparences et la réalité ne sont que ce qu’elles sont, cette leçon réserve bien des surprises…

La salle comble de la Pépinière est conquise, attentive, curieuse. Le plaisir est palpable, la magie fonctionne. Et quoi de plus naturel, car les comédiens sont tous excellents, ils ne quittent pas la scène, ils la retournent, la remplissent, ne relâchent pas le rythme, ni les émotions. Ils vivent la pièce, ils jouent à se mélanger, se livrent à des confrontations, comme à des exercices théâtraux des plus drôles aux plus difficiles. Le tout est joliment accompagné en musique et en live par un pianiste qui sait bien utiliser son clavier pour créer des bruitages, donc des atmosphères… Et atmosphère caliente, surtout avec le surprenant Fayçal Safi, impressionnant de justesse et de vérité, qui prouve qu’il sait manier le feu comme la glace, tant il est entier, habité, grandiose !

C’est indéniablement un très beau spectacle, remarquable double exploit (texte et mise en scène), dernier en date (et à la scène) du pluridisciplinaire polyvalent franco-britanno-polonais, le multi et multi moliérisé “wonder boy” du théâtre : Alexis Michalik.

Tout en faisant un bel éloge au 6ème art dont on le sait passionné, Alexis le farceur s’amuse, comme à son habitude, à brouiller les pistes, à emmêler les bobines du fil d’Ariane, en mélangeant les couleurs, du passé, du présent, de l’avenir, en superposant le fantasme au vécu, le rêve au réel.

Démonstration brillante de force du Théâtre. Et il faut reconnaître qu’avec Michalik tout est possible, en même temps : rire et maudire, pleurer et sourire, pulvériser les barreaux, flouter les frontières, renverser les pouvoirs. Tissage ingénieux et complexe dont il a le secret… Devant tant de matière bouillonnante, on se surprend à espérer ne serait-ce qu’une petite lueur de conclusion explicite en guise d’indice. Mais n’y comptez pas ! Ce serait trop simpliste, on ne peut pas non plus tout avoir… 

Luana Kim

 

Intra Muros

De et mis en scène par : Alexis Michalik

Avec : Jeanne Arènes, Bernard Blancan, Alice de Lenquesaing, Paul Jeanson, Fayçal Safi

Musicien : Raphaël Charpentier