Eduardo De Filippo est-il, comme cela se murmure, le Molière italien ? Peu importe, c'est un auteur comique, un comédien également, dont l'univers peut faire penser à Labiche. De lui, on avait déjà pu apprécier « la grande magie », pièce à intrigue, plutôt brillante et bouffonne.

Celle-ci est inédite à Paris et nous transporte dans un hôtel de bord de mer où a débarqué une troupe un peu miteuse de comédiens. Il y a là Gennaro, chef de troupe, sa femme enceinte, plus quelques autres. Un riche imprésario conte fleurette (et plus) à une belle jeune femme du coin qui refuse obstinément de lui révéler qui elle est. Or elle s'avère attendre elle aussi un enfant. Quand Vincenzo, le jeune homme aura appris que sa chérie est mariée à un comte, il choisira  de se faire passer pour fou… afin de sauver l'honneur de la belle. Dans le titre de la pièce, le galant homme c'est évidemment lui.

Raconter les mille et une péripéties serait difficile : qu'on sache, simplement qu'il y aura des quiproquos, des poursuites, des cris, des pleurs pour rire, de quoi, assurément se carrer dans son siège en attendant la suite. Et celle-ci n'est pas inférieure : à retenir une fabuleuse séance de répétition de spectacle où Jean-Jacques Blanc (en Gennaro) fait montre d'un sens du comique « hénaurme». C'est d'ailleurs ce comédien baroque, drôle, excessif, qui tire toute la pièce et l'ensemble de la distribution. Bravo à Raphaëlle Lenglare en Bice, la douce amoureuse dépassée et à Yvette Poirier, truculente à souhait.

Nous aurons aussi droit à l'intervention d'un commissaire et d'un agent, d'autres gags (celui de l'eau au sirop de cerise, notamment). Il y aura la suggestion que la justice est liée, pour une part, au niveau social des individus, plus quelques remarques sur la folie qui fait loucher la pièce du côté du « Henri IV » de Pirandello. Pas de panique, là n'est pas l'essentiel et c'est avant tout une comédie, une belle et franche comédie où l'on rit beaucoup.

Le décor mobile et transparent est ingénieux. Quant à la mise en scène de Patrick Pelloquet elle tourne rond, elle aussi, mettant en relief les moindres nuances de la pièce de De Filippo. Les comédiens, nombreux, sont tous très bons, ayant travaillé chacun dans le sens de la caricature, d'une sorte de stylisation, très commedia del ‘Arte. 

N'hésitez pas, donc, à prendre le chemin du théâtre 14 !

Gérard Noël

 

 

Homme et galant  homme

De Eduardo de Filippo.
Traduction : Huguette Hatem
Mise en scène : Patrick Pelloquet

Avec Jean-Marc Bihour, Jean-Jacques Blanc, Pierre Gondard, Hervé Gouraud, Thibault Lacour, Raphaëlle Lenglare, Yvette Poirier, Gwénaël Ravaux, Patricia Varnay, Philippe Vermeulen.

Assistante à la mise en scène : Hélène Gay.
Scénographie : Sandrine Pelloquet.
Costumes : Sylvie Lombart.
Lumières : Emmanuel Drouot.
Maquillage : Carole Anquetil.
Régie : Hugo Richard
Habilleuse : Christelle Yvon.