GRAND GUIGNOL Une série théâtrale d'épouvante, cocasse et coquine |
Théâtre 13 / Jardin Frédéric Jessua et Isabelle Siou ressuscitent le Grand Guignol qui fit les délices du public de 1897 à 1962 à Pigalle, rue Blanche. Les beaux messieurs et les belles dames adoraient s'y encanailler, les premiers souvent accompagnés de leurs maîtresses, belle occasion de les réconforter après tant d'émotions. Les deux metteurs en scène accomplissent ici un travail remarquable, tant dans le choix des décors ou des costumes que dans la direction d'acteurs, reconstituant parfaitement l'esprit de l'époque. Bien sûr, les spectateurs de notre époque qui en a vu bien d'autres ne vont pas s'évanouir de frayeur – même si on ne peut s'empêcher parfois de sursauter – mais c'est surtout le rire qui l'emporte, un rire salvateur, joyeux, bon enfant, signe de réjouissance et d'appréciation de la réalisation. Car tout est extrêmement jubilatoire, le kitch voulu de l'ensemble, le jeu à outrance style cinéma muet, le sang qui coule à flots, inondant corps et vêtements, les péripéties inattendues et le plaisir évident que prennent les comédiens à faire partager un style de théâtre disparu. On retrouve avec plaisir les thèmes chers à l'époque, la passion du spiritisme, les débuts de la psychanalyse, jouant habilement sur tout ce qui peut terrifier, la peur de l'inconnu, les remords, les déviances sexuelles. Les interprètes nous emportent avec conviction dans un tourbillon de gestes et de paroles, d'expressions exagérées à dessein, ratant une trépanation, coupant des doigts, assassinant à qui mieux mieux, répandant à plaisir des litres d'hémoglobine, osant des scènes d'amour saphique. Et on imagine volontiers le spectateur de l'époque tour à tour épouvanté, choqué, émoustillé alors que l'on rit à gorge déployée ! De ce qui nous est donné à voir mais peut être aussi de nous-mêmes.
Nicole Bourbon
Grand Guignol. Une série théâtrale d'épouvante, cocasse et coquine
L'Amant de la morte, de Maurice Renard (1925) Mise en scène : Frédéric Jessua
Le Baiser de sang, de Jean Aragny et Francis Neilson (1929) Mise en scène : Isabelle Siou
Les Détraquées, d'Olaf et Palau (1921) Mise en scène : Frédéric Jessua Avec : Justine Bachelet ou Claire Guionie, Élise Chièze, Clémentine Marmey, Dominique Massat ou Isabelle Siou, Stéphanie Papanian, Julien Buchy ou Joseph Fourez, Jonathan Frajenberg ou Jonathan Hume, Frédéric Jessua et Aurélien Osinski Scénographie : Frédéric Jessua
|