GERTRUD

Le Monfort
106, rue Brancion
75008 Paris
01 42 65 90 00

Jusqu’au 13 décembre
du lundi au samedi à 20h30

 

Gertrud loupe

 

Il y a dans ce spectacle une absence de tout. Texte, mise en scène, interprétation, décor, chaque élément travaille à créer du vide. Comme si tout était fondamentalement faux, apparence, gesticulations vaines, bourgeoisie prête à vomir, mais rien dans le ventre, hélas ! Rien qui veuille s’engager, prendre parti, sinon le parti journalistique qui justement se vante de ne pas prendre parti.

Et pourtant, ce n’est pas faute de pensées, de réflexions ni même de talents, mais comme une peur tellement craintive de mal faire que rien n’est fait. On croirait voir un brouillon vaguement théorique d’un projet vaguement envisagé, un schéma.

L’histoire doit être intéressante : une femme du début du siècle dernier, épouse d’un homme sur le point de devenir ministre, une notable donc, choisit la passion adultère pour un jeune artiste. Ressurgit alors un amour de jeunesse pour un auteur devenu célèbre.

Tout se passe au moment où les destins des trois hommes de sa vie se croisent, au moment où elle prend conscience qu’elle espère autre chose de l’existence que le destin d’épouse, de maîtresse ou d’égérie, au moment où les pulsions sensuelles ne suffisent plus, au moment où elle perçoit la nécessité de se réaliser autrement, de s’émanciper des hommes, de l’amour et de ce qui a toujours été son seul destin possible dans une société masculine. Hélas, la mise en scène de Jean Pierre Baro ne nous raconte pas cette histoire.

Elle se contente de symboles disséminés partout, dans le décor, dans la direction d’acteurs, dans les longues et ennuyeuses interventions de valets de scènes. C’est un peu comme si l’on était forcé d’assister aux manipulations incompréhensibles d’un chimiste ou d’un mathématicien dans son atelier : c’est laborieux, même si c’est certainement très voulu.

Un spectacle d’école, gangréné d’esthétisme académique, de poésie de manuel et d’érotisme glacé.

Les comédiens évoluent comme des poissons dans un aquarium. Dans un monde totalement à part, isolé du réel. Ils ne respirent pas le même air que nous, ils ne marchent pas dans le même univers que nous, mais ils nagent entre eux et se mordillent de temps en temps dans cette décoration post-modern ou pré-virtuelle sans émotion.

Pour l’histoire : Hjalmar Söderberg, auteur suédois, a produit Gertrud en 1906. Carl Theodor Dreyer, cinéaste danois en a fait un film en 1964.

Bruno Fougniès

 

Gertrud

de Hjalmar Söderberg
Traduction de Jean Jourdheuil et Terje Sinding
Adaptation et mise en scène : Jean-Pierre Baro
Lumières Bruno Brinas
Scénographie Mathieu Lorry Dupuy
Son Loïc Le Roux
Costumes Magali Murbach
Assistant à la mise en scène Franck Gazal
Collaboration dramaturgie Cécile Jeanson
Chanson Guillaume Allardi

Avec : Jacques Allaire, Cécile Coustillac, Elios Noël, Tonin Palazzotto et Michèle Simonnet

 

Mis en ligne le 8 décembre 2014

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