EYOLF (QUELQUE CHOSE EN MOI ME RONGE)

Théâtre de l'Aquarium
La Cartoucherie
Route du Champ de Manœuvre
75012 Paris
Tél : 01 43 74 99 61
Jusqu'au 3 mars 2013, du mardi au samedi à 20h30, le dimanche à 16 h


Photo Marc Casal Liotier

Dans une salle à manger banale et peut-être actuelle (voir les jeans que portent deux des personnages) Rita accueille son mari Alfred, revenu d'une retraite dans la montagne pour, dit-il, se consacrer à sa grande œuvre, l'écriture de « la responsabilité humaine ». Sa sœur à lui, Asta, arrive. Discussion. Assez vite, elle roule sur Eyolf, le pauvre petit Eyolf, handicapé depuis sa chute d'une table. Cet échange est interrompu par l'arrivée de la « femme aux rats », une chasseuse de rats qui marque fortement Eyolf et qui, indirectement, entraînera sa mort. Le premier acte de la pièce, dit la metteure en scène est celui de Rita : cette femme aimante et surtout désirante, qui veut son mari tout à elle et non dévoué à un enfant qu'elle a pourtant mis au monde. Le second acte sera celui d'Alfred, qui se débat entre deux femmes, son épouse et sa sœur qui, finalement, ne l'est pas vraiment.

Autant le début choquait quelque peu, à cause du côté statique des personnages et de cet éclairage cru, autant le second acte est réussi : la lumière y est belle, le jeu des acteurs tenu, (on pense au travail de Claude Régy) et le texte d'Ibsen prend tout son sens et toute sa force. Il s'agit bien là d'une parole qui s'échange entre les personnages (répliques courtes pour la plupart) qui révèle autant qu'elle tait. Il y a, une fois les choses mises en place, un côté inéluctable, un précipice qui s'ouvre, qu'on côtoie en souhaitant que les personnages n'y tombent pas. Ce qui ne manque pas, bien sûr, d'arriver. L'auteur y veille. Le troisième acte verra Asta se perdre et se trouver tout à la fois. Elle répondra aux avances de l'ingénieur Borgheim, dernier pivot de ce jeu des quatre coins auquel le petit Eyolf aurait pu jouer.

La nudité est utilisée une première fois par Rita pour exprimer son désir. Une seconde, et là c'est Albert qui est nu après la mort de son fils, pour suggérer le renouveau. Asta l'accompagne, cette reconstruction, en apportant des vêtements à son frère.

L'originalité du travail de Hélène Soulié est de ne rien lâcher. De faire suffisamment confiance au texte d'Ibsen et on ne peut pas lui donner tort. De croire aussi en ses comédiens qui sont tous en place, inspirés, avec une mention spéciale à Dominique Frot en femme aux rats dans une scène mémorable. Et déterminante pour la suite de l'histoire.

La fin de la pièce, le côté rédemption,  tout passe : et quel plus beau symbole pour les larmes rentrées des personnages que ces rigoles d'eau sur le sable, dans le jour déclinant ?

Ou naissant, on ne sait pas trop.

 

Gérard NOEL

 

 

Eyolf (Quelque chose en moi me ronge)

Pièce de Henrik Ibsen.
 Mise en scène et dramaturgie de Hélène Soulié.
Assistant à la mise en scène : Renaud Diligent.

Avec : Elsa Agnès, Claire Engel, Dominique Frot, Régis Lux, Emmanuel Matte et (en alternance) les enfants Arthur Rouesnel, Diego Guerra et Roméo Creton.

Scénographie : Emmanuelle Debeuscher.
Costumes : Catherine Sardi
Lumières : Maurice Fouilhé.
Son : Adrien Cordier.
Vidéo : Maïa Fastinger.

 

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