EL TIGRE

Théâtre du Rond Point
2 bis av. Franklin D. Roosevelt
75008 Paris
01 44 95 98 21

Jusqu'au12 janvier 2014
Du mardi au samedi à 21h00
Matinées samedi à 17h30, diamanche à 15h00

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Mis en ligne le 21 décembre 2013

El Tigre

Revoilà Alfredo Arias, l'enfant terrible du spectacle à l'époustouflante carrière couronnée de nombreux prix, spécialiste du fantastique fantasque. On se souvient avec émotion de son Buenos Arias d'une incroyable, généreuse  et kitchissime fantaisie.

Il s'aventure cette fois sur les rives du cinéma hollywoodien de la grande époque qu'il va joyeusement démystifier à grands coups de textes et chansons complètement loufoques et surréalistes, non exempts d'une féroce cruauté, d'un mauvais goût et d'une autodérision assumés.

Ce conte éminemment barré, un Christmas Pantomime comme le nomme Alfredo Arias himself venu présenter son œuvre en lever de rideau, nous présente des personnages hauts en couleur comme il les affectionne.

Prenez une sorte de Blanche-Neige très drag-queen, Fatafatale, un travesti amoureux du cinéma, Holy, accompagné de son serviteur qu'il transforme en servante, Fernand Fricotin, (allusion au Bibi Fricotin des BD de mon enfance ?). Ajoutez-y une improbable indienne Tota, puis le fantôme de Lana Turner, sa fille et une vampire.

Mettez-les dans un décor d'un kitch absolu, tableau maquette censé représenter El tigre – une région au Nord de Buenos Aires et non l'animal du même nom – avec marais et gratte-ciels se découpant dans le lointain.

Imaginez une histoire farfelue où ces personnages vont se télescoper, les premiers rêvant de reconstituer le grand mélo de Douglas Sirk, Mirage de la vie, cherchant qui sera Lana Turner, la star mythique à la vie tumultueuse, mariée sept fois et qui disait le plus sérieusement du monde : « Un homme qui a réussi est un homme qui gagne plus d'argent que sa femme n'en dépense. Et une femme qui a réussi est une femme qui a trouvé un tel homme. »

Rajoutez pour couronner le tout des extraterrestres.

Et vous obtiendrez un flamboyant « bordel » passez-moi l'expression, où rien ne va se passer comme prévu, faisant basculer le film sentimental  dans un vaudeville inattendu digne d'Ed Wood, spécialiste des  films à petit budget, célèbres  pour leurs erreurs techniques et leurs effets spéciaux amateurs, réalisateur qualifié de « plus mauvais cinéaste de l'histoire du cinéma » par les critiques Michael et Harry Medved !

Pour cette improbable histoire il fallait des interprètes qui se coulent dans ce moule très spécial, qui sous des aspects vraiment fous, demande une gestuelle de haut niveau et une extrême précision.

Et là, c'est vraiment un sans faute. Ils sont tous talentueux mais trois d'entre eux sont réellement exceptionnels.

Deux qu'on ne présente plus Arielle Dombasle  et Denis d'Arcangelo.

Arielle Dombasle, dans un rôle à sa totale démesure, et qui parvient à en faire des tonnes avec un naturel confondant, est littéralement fascinante. Avec sa blondeur et une  taille de guêpe à la Barbie moulée dans un superbe fourreau noir, elle EST la star hollywoodienne dans toute sa splendeur tout en  cassant savamment cette image avec un humour et une aisance stupéfiants. Elle chante de plus divinement bien, se jouant des difficultés, passant du grave aux aigus sans effort apparent !

Denis d'Arcangelo nous enchante une fois de plus, déclenchant l'hilarité générale à chaque apparition – son fantôme de Gabin est à hurler de rire – Il a une capacité bluffante à passer d'un personnage à un autre avec un abattage sidérant.

La troisième est Alexie Ribes dans le rôle de la fille hystérique de Lana Turner. Explosive, hurlant, se démenant comme un beau diable, elle parvient cependant à nous faire toucher du doigt la détresse de son personnage.

 Alors on pourrait chipoter, trouver le scénario un peu léger, les dialogues peut-être pas assez incisifs mais l'ensemble est parfaitement réjouissant avec des musiques qui collent parfaitement à l'ambiance – on est loin de celles des Choristes, Bruno Coulais est un compositeur vraiment éclectique –, jouées qui plus est par de vrais musiciens,  les morceaux de bravoure sont nombreux et superbement servis par des interprètes au top.

De quoi passer vraiment un excellent moment.

Nicole Bourbon

 

 

El Tigre

Livret et mise en scène Alfredo Arias
Composition musicale Bruno Coulais
Collaboration artistique René de Ceccatty

Avec : Denis D'Arcangelo, Carlos Casella, Arielle Dombasle, Alejandra Radano, Andrea Ramirez, Alexie Ribes

Violons Christophe Guiot, Elisabeth Pallas, alto Françoise Gneri, violoncelle Jean-Philippe Audin
Scénographie Elsa Ejchenrand, José Cúneo
Costumes Pablo Ramirez
Lumières Jacques Rouveyrollis
Assistant mise en scène Olivier Brillet
Assistante lumières Jessica Duclos