COMTESSE DE SÉGUR NÉE ROSTOPCHINE
Studio Hébertot
78bis boulevard des Batignolles
75017 Paris
Tel : 01 42 93 13 04
Jusqu’au 2 juillet 2017
Du mardi au samedi 19h00 – matinée le dimanche à 17h00.
Être convié dans le salon de la Comtesse de Ségur et l’écouter nous raconter avec l’élégance d’une femme hors du commun, sa vie particulièrement riche est le privilège que j’ai eu ce soir en assistant au magnifique seul en scène de Bérengère Dautun, sociétaire de la Comédie Française. Elle s’approprie Sophie Rostopchine comme une sorte de double intime avec une telle véracité que l’on peut avoir l’étrange impression de rêver et de replonger dans l’univers de ses romans de notre enfance. La romancière, auteur de Un bon petit diable, Les petites filles modèles ou Les malheurs de Sophie entre autres, nous prend doucement par la main et nous déroule avec charme et talent les épisodes de son incroyable destin.
Dans une stricte robe XVIIIème siècle à col de dentelle, face au public, devant l’imposant canapé recouvert de velours rouge où traînent les livres qui l’ont accompagnée sa vie durant, elle nous invite à Voronovo près de Moscou, immense domaine où elle a grandi entre un père gouverneur général de Moscou et une mère autoritaire, au cœur sec, adepte des punitions corporelles avec un goût particulier pour les coups de fouet. Nous comprenons très vite qu’elle lui inspirera le personnage de Fédora Fichini, femme cruelle dans Les petites filles modèles, tandis que son père sera le Général Dourakine au sang chaud mais au grand cœur.
Ce sera ensuite l’incendie de Moscou face à la Grande Armée, ordonné par son père, la disgrâce et son exil en France où elle rencontra le comte Eugène de Ségur qu’elle épousera et qui lui donnera huit enfants. Époux volage et désœuvré, il la délaissera dans son château des Nouettes en Normandie, offert par son père avant son retour en Russie. Puis vint la dépression, la folie qui la guette, seule, désemparée, elle s’enferme dans un mutisme désarmant. Sa vocation tardive pour l’écriture la sauvera. Sortant parfois de son passé pour nous parler du monde d’aujourd’hui comme cette étrange invention qu’est le téléphone portable ou les dialectes de banlieues qu’elle ne comprend pas toujours, nous l’accompagnons presque malgré nous vers son dernier souffle, celui d’une vie bien remplie.
Le texte de Joëlle Fossier est du champagne, l’interprétation de Berengère Dautun du caviar, un véritable festin de tsar, pour un beau moment d’histoire, un précieux voyage hors du temps. Une grande dame de théâtre qui salue à la fin par une révérence le public charmé par tant de grâce, de raffinement et de justesse. Je conseille vivement de vous inviter dans son salon pour y faire une inoubliable rencontre.
Patrick Rouet
Comtesse de Ségur née Rostopchine.
Auteur : Joëlle Fossier.
Mise en scène : Pascal Vitiello assisté de Mathieu Nenny.
Interprète : Bérengère Dautun (sociétaire de la Comédie en scène)
Photographies : Bruno Baccheschi.
Son : Sylvain Denis.
Lumières : Jérémy Izad.
Mis en ligne le 29 janvier 2015
Actualisé le 9 mai 2017