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CONFESSION D'UN ENFANT DU SIÈCLE |
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Théâtre du Marais
« La confession d'un enfant du siècle » est un joli spectacle qui vaut largement le détour par cette petite salle du Théâtre du Marais. À la fois personnel et universel, il dépeint les affects du personnage principal avec une crudité et un réalisme tels que les échos de son récit vont jusqu'à résonner dans l'histoire personnelle du spectateur, quels que soient son âge et ses orientations sexuelles. Car enfin, on a tous été un jour l'objet ou le sujet d'une passion amoureuse dévorante faite d'accès et d'excès plus ou moins tumultueux. Si elles savent pimenter le couple lorsqu'elles sont distillées à petite dose, la jalousie, la colère, la frustration et les paroles cyniques qui émaillent ce type de relation tendent à tacher et gâcher la candeur et la pureté de la fragile porcelaine dans laquelle des amants partagent et nourrissent leurs sentiments. Au-delà d'une certaine dose, le vase déborde, la coupe est pleine et la vaisselle conjugale vole en éclats. Il devient dès lors difficile voire impossible de recoller les morceaux pour remettre le couvert, la vue douloureuse des fêlures et points de rupture étant à l'usure plus délétère que le souvenir ténu de la joie éphémère du pardon éploré et des excuses amères. Adapté de l'uvre autobiographique éponyme d'Alfred de Musset, ce portrait fidèle de l'auteur romantique nous rappelle une fois de plus que l'on ne badine pas avec l'amour car il peut avoir de graves conséquences physiques et psychologiques, autant sur les corps que sur les curs aimantés des amants mal-aimés hantés par le mal-être. Sans doute inspiré par sa liaison houleuse avec George Sand, l'auteur explique ainsi avec une franchise et une sincérité déconcertantes comment on peut être l'instigateur et l'acteur malheureux d'un drame sentimental qui se trame autour du personnage d'Octave, victime collatérale de sa folie passionnelle pour la belle et inattendue Brigitte Pierson. Jouée dans un décor intimiste et convivial, accompagné d'une chaleur diffuse qui met tout de suite à l'aise et dans l'esprit de la confidence, avec des passages furtifs derrière un paravent translucide, des éclairs de musique classique et des jeux de lumière fugaces comme seuls interludes qu'accorde la pièce à son personnage, à la fois conteur et acteur. cette pièce est un véritable « one-man-show » pour le seul comédien en présence qui s'avère magistral dans un rôle qu'on imagine taillé sur mesure tellement il lui colle à la peau. Avec sa voix rauque qui porte et enchante, forte et pénétrante, Bertrand Farge interprète tour à tour un philosophe dogmatique chroniqueur de son temps, un Dom Juan charismatique triomphateur de l'amour, un jaloux pathétique manipulateur de sentiments et enfin un sage alcoolique moralisateur. Le visage du comédien et tout son corps pétri d'émotions changeantes et contradictoires livrent un parfait reflet des vicissitudes de l'âme d'un dandy débauché qui se mue par amour en un être torturé, victime des transports bipolaires de sa psyché. Donnant tout ce qu'il a dans le ventre durant près de deux heures, il parvient à déclamer sans aucune erreur ni bafouillis un texte poétique pourtant ardu et conséquent, avec une rythmique et des intonations a priori difficiles à tenir pour captiver l'audience et entretenir l'atmosphère dans laquelle il l'emmène. Un travail remarquable, donc, dans la diction comme dans les gestes et leur enchaînement. Bravo ! Allez voir cette pièce touchante sans attente ni idée préconçue et, à coup sûr, vous serez charmé(e) par cette adaptation captivante de l'uvre d'un Musset qu'on regrette de ne pas voir davantage au programme des écoles, des théâtres et des musées.
Camille Grosjean
La confession d'un enfant du siècle D'Alfred de Musset, adapté par Frédéric Vossier Équipe de création : Elsa Belenguier, Allaoua Chettab, Hervé Guérande-Imbert, Jean-Baptiste Herry, Maïa Jarville, Laetitia Lecerf, Ludivine Remy Production : Théâtre du Trèfle
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