AVANT LA NUIT
A la Manufacture des Abbesses
7 rue Véron
75018 PARIS.
01 42 33 42 03
Jusqu'au 7 mai 2014
tous les dimanches, lundis, mardis et mercredis à 21H.
Après une entrée en matière dont il vaut mieux que vous ayez la surprise, voici que, dans un décor de chaises, se présentent à nous huit personnages : ils sont disparates, caractérisés en un clin d'œil, la mère à bout, la grand-mère spirituelle, l'urgentiste, le dramaturge, le jardinier… ils sont tous là à la suite d'une grève de train. Chacune et chacun tente de rejoindre la capitale et surtout la gare Saint-Lazare au nom porteur.
La principale qualité de cette pièce de Constance Dedieu-Grasset est d'être généreuse : à partir de ce prétexte de la grève, elle fait se rencontrer une kyrielle de gens et les fait « débattre » de la situation actuelle, tout autant politique que sociale. Il y a des trouvailles, certains personnages sont mieux campés que d'autres sur le papier, certains « fonctionnent » mieux. Il y a des facilités dans le texte : le cadre, en sortant de sa boîte, …va en boîte. — Clochard, dit-il, arrête ta cloche ! Par parenthèse, il semble que le mot SDF ait remplacé « clochard ».
Cette analyse de groupe tourne parfois à la conversation style café. L'enjeu pourrait être plus fort. Des évidences sont énoncées, même si l'exemple des « potlach » (comportement basé sur le don) est expliqué, comme est soulignée l'opposition pauvreté (avec aide) et misère. On pourrait estimer, également, que tous, y compris le « cadre » se rangent un peu trop vite au constat fait et à la décision prise de marcher… car ils se mettent en route (moment réussi) et l'aventure continue pour eux le long des voies de chemin de fer. On en apprend aussi un peu plus sur chacun : beaux moments avec « l'Afro-Auvergnate » ou l'étymologue-urgentiste, dont le personnage aurait mérité d'être développé. Il y a des moments de poésie, la philosophie du « clochard », transcendée par son interprète et des chansons, plutôt bien venues, gospel ou autre. L'histoire finit sans finir : les voilà arrivés à la gare Saint-Lazare et nous spectateurs sortons dans la nuit, moins secoués que nous aurions pu l'être, mais un peu interpellés.
Au final, une ébauche, plutôt sincère, d'une grande pièce politique et revendicatrice. Jouée et éclairée finement. A voir, comme on le disait à l'époque, « pour ne pas mourir idiot ».
Gérard Noël
Avant la nuit
Texte : Constance Dedieu-Grasset,
co-mise en scène par Gwenaëlle Mendonça.
Musique : standards et créations originales d'Emmanuel Djob.
Avec : Thierry Blanc, Constance Dedieu-Grasset, Françoise Limouzy, Périne Lislet, Marc Marchand, Caroline Piette, Alexandre Soulié, Alexandre Zloto.
Création lumières : Leslie Sozansky.
Photo et vidéo : Florent Hindson.
Peinture : Roland Lamon.